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inférieur à son frère, mais plus énergique que lui, et le savant Nigidius Figulus, qui était aussi un homme de grand cœurs, furent fort préoccupés d’empêcher qu’il ne cédât à quelque défaillance fâcheuse.

La journée du 3 décembre n’avait été qu’un triomphe pour Cicéron. Celle du lendemain fut mêlée d’incidens moins heureux. Dans la séance que tint le Sénat, on décerna des récompenses publiques à T. Vollurcius et aux Allobroges, qui avaient révélé les projets des conjurés. Est-ce ce qui encouragea le zélé des dénonciateurs ? Ils étaient nombreux à Rome et formaient une véritable corporation. On les voyait se promener auprès des tribunaux avec leurs dossiers sous le bras, toujours prêts à accuser les gens pour toucher le quart de leurs biens qu’on leur allouait, quand ils les faisaient condamner. On les estimait très peu, mais on s’en servait beaucoup, et il fallait bien qu’on s’en servît puisqu’il n’y avait pas à Rome, comme chez nous, d’accusateurs publics. Un certain L. Tarquinius, qu’on avait arrêté sur la route pendant qu’il allait retrouver Catilina, promit de donner sur la conjuration de nouveaux renseignemens, pourvu qu’on l’assurât qu’il ne serait pas poursuivi. Il ajouta quelques détails à ce qu’on savait déjà, et nomma Crassus parmi les conjurés. Mais à peine eut-il prononcé ce nom que des cris d’indignation s’élevèrent de tous les côtés. Crassus avait beaucoup d’amis et d’obligés. Il était le créancier d’une partie de la noble assemblée ; il ne pouvait pas être coupable. Il fut donc décidé sans autre recherche que Tarquinius mentait et qu’on le tiendrait en prison jusqu’à ce qu’il eût dit qui lui avait conseillé ce mensonge.

Le tour de ; César vint ensuite. Il fut accusé, dans le Sénat, par Curius, en même temps que Vettius, un dénonciateur de profession, le traduisait devant le questeur Novius Niger. Ils prétendaient tous deux tenir de Catilina lui-même la preuve qu’il était coupable. César ne répondit à Vettius qu’en ameutant le peuple contre lui et le faisant jeter en prison. Mais devant le Sénat, il lui fallut s’expliquer. Il fit appel au témoignage de Cicéron et se défendit si bien que les sénateurs privèrent l’accusateur de la récompense qu’on lui avait promise. À ce propos, Salluste rapporte que Q. Catulus et Cn. Piso essayèrent d’obtenir de Cicéron, par tous les moyens, et même en lui offrant de l’argent, qu’il fît accuser César par les Allobroges ou par