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Le dimanche n’est donc point en Belgique un jour légalement férié, mais il demeure officiellement consacré comme jour de repos, parce qu’il « coïncide avec une fête de la religion de la majorité[1]. »

Il en résulte notamment que, dans l’armée, toute latitude est laissée aux hommes pour l’accomplissement de leurs devoirs religieux. Sous aucun prétexte, autre que celui de l’intérêt public, ils ne se voient privés d’assister aux exercices de leur culte.

Mais, puisque les citoyens appelés sous les drapeaux y sont, au point de vue religieux, exempts de toute contrainte, puisque, libres de pratiquer leur religion, ils le deviennent de n’en pratiquer aucune, comment les forcer à rehausser parfois de leur présence les cérémonies du culte catholique, comment les obliger à rendre au Saint-Sacrement les honneurs accoutumés ?

La réponse est aisée.

Si en effet les autorités gouvernementales s’associent à certaines solennités de la religion catholique, parce qu’elle est celle de la majorité, l’armée doit suivre cet exemple. Mais alors l’homme de troupe n’agit plus comme citoyen. Il participe simplement à l’acte public du corps constitué dont il fait partie. C’est comme « dépositaire de la force armée[2] » qu’il rend les honneurs au Saint-Sacrement.

Le respect de la foi du plus grand nombre a également fixé en Belgique la formule du serment judiciaire, sans pour cela porter atteinte à l’indépendance des consciences.

Anciennement, dans certaines provinces, le témoin après avoir, en levant la main droite, prononcé les mots : « Je le jure, » ajoutait : « ainsi m’aident Dieu et les saints. » Dans les autres provinces il prenait Dieu seul à témoin.

« Je le jure, ainsi m’aide Dieu, » reste aujourd’hui en Belgique la formule légale du serment. Le législateur l’a maintenue sans en altérer le caractère religieux, parce qu’il sait que le serment fortifié de ce caractère constitue « un lien puissant. » Toutefois cette formule chrétienne consacrée par l’usage n’en devient point pour cela obligatoire aux témoins. Chacun peut prêter serment selon les principes du culte auquel il appartient, le prêter même sans aucune adjonction aux mots : Je le jure ; car

  1. Bara, ch. XIII.
  2. Thonissen, p. 61.