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réglementer que l’action des compagnies. D’autres ne croyaient pas possible cette réglementation : il n’y avait qu’à supprimer les compagnies ou se résigner à leurs mauvaises pratiques, et, comme cette résignation paraissait peu morale et peu patriotique, on en était venu à l’idée de faire du remplacement une institution d’État. Cette conception avait apparu dès 1818, dans les débats des Chambres. En 1844, le maréchal Bugeaud, dans une lettre adressée d’Afrique aux députés et aux pairs de France, proposait d’accorder pendant la paix la faculté de se libérer du service moyennant une somme de 1 500 francs, que l’État emploierait à engager des hommes d’élite. Se rangeant à cette idée, en 1848, Thiers avait suggéré de charger l’État de faire lui-même le remplacement. Lamoricière, dans un rapport approuvé par Bugeaud, proposa l’établissement d’une caisse d’exonération ou de dotation dans laquelle tout citoyen, voulant se libérer du service militaire, verserait, avant le tirage au sort, une somme annuellement fixée par la loi du contingent. Les ressources de la caisse de dotation serviraient à assurer un pécule aux appelés et à favoriser les engagemens et rengagemens par des primes et des pécules garantis aux volontaires après sept années de service. On faisait ainsi des armes un état où l’avenir de tous ceux qui s’y destinaient, volontaires et appelés, était assuré. Surtout on créait la profession de sous-officier, ce qui, disait le général Paixhans, devait donner de la solidité permanente, affermir la discipline et toutes les bonnes conditions qui font les bonnes armées. Le projet de Lamoricière n’arriva pas à réalisation ; l’Assemblée en se séparant le laissa à l’état de rapport.


II

Napoléon III, sans toucher au mécanisme de la loi de 1832, essaya d’obvier à ses deux principales défectuosités. Il s’occupa J’abord du remplacement. Reprenant l’idée de La Bastide, de Paixhans et de Bugeaud, il en fit une institution d’État, et créa une Caisso de dotation de l’armée, distincte du Trésor public, ayant ses ressources spéciales garanties par l’État. Tous les jeunes appelés eurent le droit de se faire exonérer par le versement d’une somme que déterminait annuellement le ministre de la Guerre. L’exonération pouvait être accordée à ceux qui étaient déjà au service après autorisation des chefs de corps. Les