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pas la voix du sang, s’exprimait sur cette mort plus librement. Elle échangeait parfois des lettres avec le duc de Noailles, le mari de sa compagne d’enfance et de jeu, Mlle d’Aubigné, lettres très courtes, car elle n’avait pas la plume facile, mais toujours d’un tour aimable. « Je ne sais comment je suis présentement dans vos bonnes grâces, lui écrivait-elle alors qu’il commandait en Espagne, mais ce que je sais fort bien, c’est que vous êtes à merveille avec moy, et que votre absence, bien loin de faire l’effet ordinaire que l’on dit qu’elle cause dans les princes réveille en moy tous les sentimens d’une amitié très tendre. » Aussi, peu de temps après la mort de Monseigneur, s’ouvrait-elle à lui, en toute sincérité, des sentimens qu’elle éprouvait. « J’ai été véritablement troublée de la mort de Monseigneur, lui écrivait-elle, mais je m’en console comme les autres ; je crois même avoir plus de raisons. Il n’y a pas assez longtemps que vous estes ors d’ici pour avoir oublié la situation de la Cour et par conséquand pour imaginer grande partie de ce que je dois penser[1]. » Saint-Simon avait donc bien raison de dire : « Jamais douleur ne fut plus courte que celle de la mort de Monseigneur[2]. » Cette mort amenait cependant à la Cour et en particulier dans la situation du Duc et de la Duchesse de Bourgogne de grands changemens qui feront l’objet de la suite de notre récit.


HAUSSONVILLE.

  1. Mélanges de littérature et d’histoire publiés en 1850 par la Société des Bibliophiles français, p. 38.
  2. Addition au Journal de Dangeau, t. XIII, p. 382.