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possibles des garanties de nature à lui inspirer pleine sécurité. Il pouvait d’ailleurs les lui donner à fort peu de frais, car nous avons eu toujours l’intention arrêtée de respecter l’indépendance du Sultan et l’intégrité de son territoire, et tous les moyens d’action que nous nous étions proposé d’employer pour inspirer, nous aussi, confiance au Maghzen, consistaient en bons conseils et en bons exemples. Mais nous ne sommes pas arrivés à nos fins, et M. de Tattenbach est arrivé aux siennes : le premier acte de l’incident marocain s’est terminé contre nous. M. de Tattenbach aurait-il donc été plus habile que M. Saint-René Taillandier ? Ceux qui jugent d’après les apparences seront peut-être portés à le dire. Mais M. Saint-René Taillandier est un agent digne de toute confiance, soit par l’expérience qu’il a acquise, soit par le sentiment du devoir qu’il a toujours eu au degré le plus élevé, et nous sommes convaincus qu’un autre à sa place n’aurait pas été plus heureux. Entre le ministre de France, qui lui demandait de faire quelque chose, et le ministre d’Allemagne, qui lui conseillait de ne rien faire, il faudrait mal connaître le Sultan du Maroc pour croire qu’il pouvait hésiter : les conseils d’inertie sont toujours ceux qui lui plaisent le plus. On nous propose donc une conférence, et cette fois l’Allemagne se découvre : elle prend la proposition à son compte et la recommande officiellement à toutes les puissances. Les journaux ont annoncé que le chargé d’affaires allemand à Paris avait remis entre les mains de M. Rouvier une note verbale qui avait cet objet. M. Rouvier ne pouvait évidemment pas répondre sans réflexion, ni sans entente préalable avec les puissances qui sont déjà d’accord avec nous dans cette affaire. Pour elles comme pour nous, une conférence est inutile et peut dès lors présenter plus d’inconvéniens que d’avantages : et qui sait s’il n’en est pas ainsi pour l’Allemagne elle-même ? Mais enfin qu’est-ce qu’une conférence ? Un simple moyen, et nous n’avons jamais été intransigeans sur les moyens. Combien de fois déjà n’avons-nous pas accepté, non pas celui qui nous paraissait le meilleur en soi, mais celui qui réunissait le plus grand nombre d’adhésions ? Reste à savoir s’il en sera ainsi de la proposition allemande, et, quand même elle réunirait le plus grand nombre d’adhésions, ce qui est douteux, il resterait encore à savoir s’il ne lui en manquerait pas d’indispensables. Quoi qu’il en soit, nous sommes saisis de la proposition. L’Allemagne l’a embrassée elle-même et s’y est jetée avec tant d’ardeur qu’il lui est peut-être difficile de reculer, et c’est une situation dont il convient de tenir compte. Mais nous demandons qu’on tienne compte aussi de la nôtre, qui ne