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LA
FORMULE DE CAVOUR

L’ÉGLISE LIBRE DANS L’ÉTAT LIBRE

Il eût été fort surprenant que, dans le débat qui s’est poursuivi sur la séparation des Eglises et de l’Etat, on ne citât point le mot, passé en proverbe, de Cavour : « l’Eglise libre dans l’Etat libre. » Aussi n’y a-t-on pas manqué, et M. Aristide Briand l’a fait, tout le premier, dans son rapport. Mais, puisqu’il l’a fait, il a donc cru qu’en le faisant il servait sa cause, à laquelle l’opinion de Cavour aurait été, selon lui, favorable. Et c’est justement la question. L’opinion de Cavour est-elle vraiment favorable à la thèse de M. Briand et de ses amis ? Cavour a-t-il vraiment voulu la séparation de l’Eglise et de l’Etat ? S’il l’a voulue, a-t-il, sous le même nom de séparation, voulu la même chose que la majorité de notre commission ? Et si par hasard il a voulu la même chose, l’a-t-il voulue dans la même intention, le même esprit et la même forme, pour la même fin, et par les mêmes moyens ?

À cette question on ne saurait répondre avec quelque sûreté qu’après avoir répondu à toute une seconde série de questions. Et d’abord, d’où venait à Cavour la formule : « l’Église libre dans l’Etat libre ? » Était-elle à lui, c’est-à-dire de lui, ou l’avait-il empruntée de quelqu’un, et de qui ? Quand l’a-t-il énoncée pour la première fois ? Quel sens précis y attachait-il et quelle