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sances qui auront pourvu aux besoins immédiats de l’administration marocaine se réservent de surveiller les effets des mesures qu’elles auront prises, soit pour les maintenir, si les effets sont bons, soit pour les modifier, si les effets sont mauvais ou insuffisans. L’œuvre à entreprendre est trop difficile et trop complexe pour qu’on n’y admette pas des retouches probablement nécessaires ; mais est-ce bien là ce que signifient les expressions dont les notes se sont servies ? Il semble bien qu’elles aient une portée plus étroite. Au bout de peu de temps, on prévoit d’avance que tout sera à recommencer, à moins qu’on ne veuille dire qu’à ce moment, le maghzen se sera tellement pénétré des méthodes européennes qu’il pourra continuer de les pratiquer à lui seul, sans aucun appui du dehors : les puissances auraient alors fini leur tâche et elles n’auraient plus qu’à se retirer. Cette seconde interprétation est celle qu’ont donnée le plus généralement les journaux allemands, non pas toutefois d’une manière aussi précise que nous le faisons nous-mêmes, mais en termes vagues, hésitans et quelque peu équivoques. En somme, on ne distingue pas très bien la pensée allemande sous les voiles dont elle se couvre, et on est amené à craindre qu’elle ne procède du désir secret de maintenir l’agitation dans les esprits en même temps que l’incertitude dans les institutions, et de conserver le moyen de recommencer, quand on le jugera à propos, une campagne analogue à celle qui vient de réussir si bien. Si c’est le but poursuivi, il n’y a rien là qui puisse nous rassurer. On s’expliquerait à la rigueur les préoccupations de l’Allemagne dans le cas où une seule puissance se serait ou aurait été chargée de faire accepter par le Sultan un programme de réformes, et de l’aider à l’accomplir. Mais ce système, qui avait été d’abord le nôtre, ayant été écarté et celui d’une conférence internationale lui ayant été substitué, on s’explique moins bien la portée des mots de « courte durée » appliqués à la première expérience des réformes. Sous prétexte de rendre le plus tôt possible au maghzen la plénitude de son indépendance, on le tient en effet sous la menace d’une intervention des puissances quasi continuelle, d’une intervention à intermittences répétées et très rapprochées les unes des autres et comment ne pas se demander si cette conception est bien conforme à celle que le gouvernement allemand avait paru d’abord vouloir nous faire accepter ! Cette conception initiale n’était autre que la remise entre les mains collectives de toutes les puissances du règlement de la question marocaine ; mais, précisément parce qu’un concert aussi complet devait avoir une autorité sans égale, il aurait été logique de ne pas assigner