Page:Revue des Deux Mondes - 1905 - tome 28.djvu/873

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

gouvernement et de nation à nation, mais l’opinion publique s’exprimait plus clairement, plus catégoriquement encore. « Que va-t-il se passer ? demandait le champion norvégien, M. Fridtjof Nansen (le champion suédois étant un autre explorateur illustre, M. Sven Hedin). Le Storthing a voté à l’unanimité une loi portant création d’un service consulaire norvégien séparé. Le cours des événemens dépend maintenant en grande partie du pouvoir royal. Il nous est difficile, à nous autres Norvégiens, de nous imaginer que le représentant du pouvoir royal en Norvège puisse refuser sa sanction à une loi réclamée aujourd’hui d’une manière aussi unanime par le peuple norvégien, et qui, depuis 1892, a toujours été victorieuse aux élections avec une puissance de plus en plus grande.

« Si pareille chose arrivait, comme on semble le supposer dans certains milieux, cela ne pourrait être que la conséquence de l’influence suédoise. » Mais l’influence suédoise n’est point constitutionnelle, en Norvège, dans une affaire norvégienne ; et, si pareille chose arrive, « il ne sera pas possible au pouvoir royal de trouver un ministère norvégien voulant prendre la responsabilité d’une telle mesure. Or, sans un gouvernement responsable, le pouvoir royal non responsable ne peut ni gouverner ni prendre de décisions gouvernementales. Si le pouvoir royal continue à maintenir son refus de sanction, il se sera par suite placé lui-même hors de la constitution, pour avoir essayé d’introduire un principe aristocratique personnel sans conseillers responsables, ce qui est en contradiction directe avec les principes et les termes de notre constitution.

« On a dit que, dans ce cas, il y aurait révolution en Norvège ; mais ce ne sera pas le peuple norvégien, ni le Storthing norvégien, ni le gouvernement norvégien, qui aura fait cette révolution ; car le fait que le peuple norvégien réclame un service consulaire distinct n’est pas une révolution ; le fait que le Storthing norvégien prend une résolution dans le même sens n’est pas une révolution ; le fait que le gouvernement norvégien conseille la sanction de cette décision ayant forme de loi n’est pas une révolution. Un gouvernement ne fait pas une révolution en refusant d’agir contrairement aux intérêts de son pays ; le fait que le pouvoir royal ne se trouve pas à même, par la suite, de former un nouveau gouvernement n’est pas non plus une révolution, car, on ne peut pas forcer les citoyens d’un pays à faire partie d’un ministère.