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et les grands lys blancs, fleurs de paradis, penchant leurs longues tiges assouplies, comme une protection, blancheur symbolique et qui ne détonne pas… Les grandes fenêtres ouvertes emportent le parfum, la brise en doit être chargée, aux alentours…

De cette salle, nous passons dans une autre. Même aspect. On est ébloui. Comment la mort ose-t-elle entrer là ?

Et d’autres salles encore. Il y a neuf services de seize à vingt lits chacun. Partout les gaies couleurs qui brillent, et le piano, et les fleurs. Mais la mort entre, cependant… Ici, elle est bien proche d’un enfant qui ne sourit plus. La fièvre qui le tient ne le quittera pas, le regard perdu n’est plus là. Je regarde la feuille qui pend devant le lit : broncho-pneumonie. Et l’organisme était chétif. De chaque côté du lit se tiennent les parens. Sur les genoux de la mère un bébé trop pâle suce gravement son biberon vide. Nous sommes bien dans un faubourg de Londres et la misère est proche.

Le petit malade a quatre ans environ : il est dans une salle d’hommes. Pas de service spécial pour les enfans, ici. Jusqu’à trois ans on les reçoit dans les salles de femmes. A partir de trois ans, on les répartit suivant leur sexe. Chaque service possède ainsi deux ou trois enfans de tous âges.

La visite des salles est terminée Nous voici au quartier des nurses. Chacune a sa chambre, petite et coquette, meubles vernis ou laqués, des bibelots, des livres et des fleurs : un enchantement partout !

Voici le salon de lecture. La petite bibliothèque est variée : Science et pratique chirurgicale. La vie en Chine. Traité des maladies du rein, et des romans. On est éclectique, ici ! Sur un divan, une jeune nurse est étendue, un livre à la main. Elle ne bouge pas à notre approche, elle se sent chez elle et dans son droit. C’est leur domaine, leur sanctuaire. Pas de fausse honte à être trouvée là, au repos. Chacune a trois heures de temps libre, chaque jour.

J’ai demandé à voir la salle d’opérations, l’amphithéâtre. Au rez-de-chaussée. Nous entrons. Autour du lit spécial, tout préparé, des jeunes filles, en blouse d’étudiantes, attendent en causant, groupées. Une opération va avoir lieu, le chirurgien est annoncé. Je devrais dire la chirurgienne, car voici une particularité de cet hôpital, les étudians y sont des jeunes filles et plusieurs des médecins en chef y sont des femmes. Les yeux