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enfin la concession définitive de Belfort, à la condition que nous abandonnerons quatre petits villages, sur la limite de la Lorraine, où se trouvent enterrés huit à dix mille Prussiens. Nous respectons ce témoignage religieux du monarque pour ses soldats.

« Nous étions partis de Paris à onze heures du matin, et nous quittions Versailles à neuf et demie du soir, ayant conservé Belfort à la France. »

Le 26, M. Thiers signait les préliminaires de la paix. Le tracé de la frontière englobant Belfort, tel qu’il avait été arrêté antérieurement par l’état-major général allemand[1], y était indiqué avec les modifications suivantes résultant de la rétrocession de la place consentie par M. de Bismarck :

« Dans l’ancien département de la Moselle, les villages de Sainte-Marie-aux-Chênes, près de Saint-Privat-la-Montagne, et de Vionville, à l’Ouest de Rezonville, seront cédés à l’Allemagne[2] ; par contre, la ville et les fortifications de Belfort resteront à la France avec un rayon qui sera déterminé ultérieurement. »

D’après une autre disposition des Préliminaires, une Commission internationale devait être chargée d’exécuter le tracé de la nouvelle frontière. Cette Commission, réunie à Bruxelles vers la fin de mars, comprenait, du côté français, le général Doutrelaine, un des officiers les plus distingués de l’arme du génie et le colonel Laussedat, de la même arme, qui avait donné, à l’issue du siège de Paris, sa démission d’officier et de professeur d’astronomie et de géodésie à l’Ecole polytechnique. Le chef de la mission allemande était le général de Strantz.

Il n’est que juste de placer ici, à côté des noms des commissaires français, ceux de M. Keller, ancien colonel des francs-tireurs du Haut-Rhin et député à l’Assemblée nationale, et de M. Gustave Renault, ancien ingénieur des ponts et chaussées de l’arrondissement de Belfort. Après avoir protesté, à Bordeaux, comme l’on sait, contre la cession de l’Alsace et de la Lorraine, M. Keller quitta l’Assemblée nationale avec ses collègues des territoires annexés, mais ne considéra pas sa mission comme terminée. Il était très frappé du peu d’espace (de 5 à 6 kilomètres) que les Allemands semblaient disposés à nous rétrocéder autour

  1. Ce tracé figurait sur une carte de l’Alsace publiée dès 1870 par l’état-major général ; il était joint au texte des Préliminaires.
  2. L’Allemagne ne reprenait que deux villages de la Moselle au lieu de quatre.