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Page:Revue des Deux Mondes - 1905 - tome 29.djvu/627

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passager de ceux-ci, mettant en jeu l’existence du christianisme au moment même où il venait d’être reconnu par l’édit de Milan. Quant au paganisme, si en Italie, en Gaule, en Grèce surtout, — où il se soutenait grâce à l’appui que lui apportaient la philosophie et la littérature, et où il s’alliait à des idiosyncrasies profondes, — il semblait avoir gardé une certaine vitalité, cependant l’envahissement des dieux orientaux, le culte de Mithra et du Soleil, les pratiques de l’occultisme et de la magie avaient altéré sa pureté. Il fallait aux païens comme aux chrétiens un milieu immédiat particulièrement sain, un jugement sûr pour garder dans un tel désordre les belles traditions politiques d’autrefois et ne pas verser en religion dans des extravagances de doctrines. Nous verrons si cette santé intellectuelle, cette perfection du bon sens furent la part de Julien.

Ses origines étaient des plus illustres et toutes romaines. Son père Jules-Constance, frère consanguin de Constantin le Grand, était l’un des fils que Constance Chlore avait eus, après la répudiation de sainte Hélène, de son mariage avec Théodora, belle-fille de Maximilien-Hercule. C’était un prince effacé, qui paraît avoir toujours été tenu par son illustre aîné dans une étroite dépendance. Le poète Ausone l’avait rencontré jeune homme, aux écoles de Toulouse. Après avoir erré longtemps, il avait vécu à Corinthe en simple particulier. Rentré en grâce, il fut fait en 335 consul et patrice. Il s’était marié deux fois, et ses deux femmes appartenaient au haut patriciat romain. De la première, Galla, il avait eu une fille qui épousa plus tard l’empereur Constance, et. Gallus qui fut César. La seconde, Basilina, la mère de Julien, mourut quelques mois après la naissance de son fils. C’était une personne intelligente et lettrée de qui Julien tiendra sans doute sa finesse de nature, et aussi cette extrême acuité nerveuse, cette inquiétude qu’on ne voit chez aucun des Flaviens ses ancêtres paternels. Basilina était chrétienne comme son mari ; mais comme lui, et comme presque toute la cour impériale à la fin du règne de Constantin, elle, paraît avoir incliné vers l’arianisme. En tout cas, l’étude des lettres païennes avait fait, ainsi qu’il était d’usage, le fond de l’enseignement qu’on lui avait donné. C’était la coutume dans les grandes familles de confier l’éducation des enfans à des professeurs esclaves élevés spécialement pour cette tâche. Celui qui instruisit Basilina était un eunuque, Scythe d’origine, nommé Mardonius. Il lui enseigna