Aller au contenu

Page:Revue des Deux Mondes - 1905 - tome 29.djvu/72

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

l’histoire y est surtout propre. Il faut que l’enfant apprenne par l’histoire comment son pays a accompli les plus grands desseins, sous la direction de la divine Providence et par les vertus de ses ancêtres. » — « L’école primaire, reprenait en 1882 un inspecteur scolaire d’Angerburg, atteindra son but : l’éducation nationale des élèves, par l’enseignement de l’histoire, par les fêtes scolaires, par la personnalité du maître. » Le maître d’école allemand, par le contact de sa propre personne avec celle des enfans, a l’espoir et le ferme vouloir d’accélérer, dans les âmes qui lui sont confiées, ce que volontiers nous appellerions l’âge de raison civique ; sa personnalité même, — le mot de cet inspecteur est très frappant, — devient un des moyens de faire aimer la patrie.

S’il se trouve, dans l’Allemagne contemporaine, certains pédagogues comme M. Rein pour regretter, en termes d’ailleurs assez estompés, le caractère militariste de l’école allemande, ce trait survit, intact, à leurs susceptibilités oiseuses. À la différence de nos universités populaires, l’école d’adultes à son tour, non moins que l’école primaire, se comporte en Allemagne comme un instrument de propagande patriotique ; et le créateur même du riche Musée pédagogique de Leipzig, M. Pache, insistait, dans le congrès tenu à Hambourg en 1903, sur le rôle national de l’enseignement post-scolaire.

Ainsi l’Allemagne scolaire est instruite, assouplie, équipée, pour le service de la patrie allemande. Au-delà du Rhin comme chez nous, il peut advenir qu’une certaine naïveté d’orgueil induise l’instituteur à franchir les limites de sa modeste et superbe tâche et à s’ériger, devant le petit monde en vue duquel il vit, comme le messager de quelque grande idée nouvelle : mais cette idée, alors, sera le pangermanisme, c’est-à-dire le songe d’une Allemagne débordant sur l’univers et se confondant presque avec lui. En ses exubérances fumeuses, l’instituteur pangermaniste, — et c’est, dans certaines régions, un type assez fréquent, — convie l’Allemagne à l’empiétement, non au désarmement ; et lorsque sa demi-science affecte des allures d’importance, c’est en prophète de l’hégémonie germanique, et non point de la fraternité des peuples, qu’il s’érige et qu’il s’affiche. Son pangermanisme, on le devine tout de suite, invoque le militarisme, bien loin de le suspecter ou d’en médire. Malgré les rigueurs dont les instituteurs allemands furent parfois l’objet à