Odes, les Iambes, du seul grand poète de la Révolution ; et les Bucoliques, d’un grand poète de tous les âges. Il semble qu’il les ait écrites, suivant la formule célèbre de Spinoza, sub specie æternitatis.
Plus de deux siècles après Ronsard, comme lui et peut-être mieux que lui, grâce à la connaissance native de la langue et à la familiarité des poètes grecs, il renouvelle dans la poésie française le sentiment de la nature que le seul La Fontaine n’avait pas entièrement méconnu. Il voit, il sent la beauté multiple des choses, il en écoute la musique et les traduit en des vers d’une harmonie et d’une couleur jusqu’alors ignorées.
Son génie est essentiellement objectif et dramatique. Il a, à la plus haute puissance, le don d’évocation, la première des vertus poétiques. Il se dédouble. Il voit, il fait vivre, il vit ses personnages ; ils semblent se mouvoir dans le milieu qui leur est naturel. Le paysage, quelque sommaire qu’il soit, participe à l’action. La mise en scène, la composition sont d’un art achevé dont la simplicité voulue redouble l’intensité. Jusque dans les moindres fragmens de quelques vers, ces qualités apparaissent, d’autant plus frappantes. Sa vision première est toute plastique. Le tableau, le quadro, comme il disait, se compose de lui-même. Il se plaît aux brusques débuts, aux entrées immédiates, et cette allure soudaine, qui précipite en plein drame, prête aux gestes, aux paroles et aux sentimens qu’ils expriment toute la force, le charme saisissant de la vie.
Les mots de mètre et de rythme n’ont jamais été nettement définis, du moins en français. Je ne tenterai pas ce que de plus savans n’ont pu faire, et ne les emploierai ici que dans le sens spécial que leur donnent la plupart des poètes. Pour eux, le mètre est la disposition mesurée et variée des syllabes du vers, et le rythme la disposition des vers de la strophe. Le rythme serait donc à la strophe ce que le mètre est au vers. L’inventeur de rythmes est celui qui trouve et combine des agencemens nouveaux de vers, de nouvelles strophes.
Pour ne parler que des anciens, Ronsard fut un prodigieux inventeur de rythmes. On n’en saurait dire autant de Chénier Le Jeu de Paume, l’ode à Versailles, une ou deux odes à Fanny et quelques essais de chœurs dans son Théâtre, me paraissent les seuls rythmes nouveaux qu’on lui puisse attribuer. Et les Iambes ? Il faut reconnaître que ni la forme, ni le titre de ces