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pour les socialistes que pour les radicaux. Nous n’examinons pas s’ils ont tort ou raison ; mais le fait est là, incontestable, et les socialistes n’ont pas renoncé à en profiter. S’ils ne sollicitent pas les voix de la réaction, ils les acceptent, pensant qu’elles se purifient en se reportant sur eux. C’est ce qui vient de se passer aux élections municipales de Toulouse, où les socialistes, bien qu’ils n’en disent rien, n’ont certainement pas la prétention d’avoir triomphé avec leurs seules forces. Aussi, quand on leur demande de fixer une règle uniforme pour le second tour de scrutin, répondent-ils qu’ils aiment mieux rester libres d’agir suivant les circonstances locales. Un congrès socialiste se réunit en ce moment même à Chalon pour discuter et résoudre, s’il est possible, ces graves questions de tactique. Mais sera-ce possible ? Si la règle établie est celle du désistement au second tour du candidat qui sera en minorité au premier, il est très probable qu’elle sera dans maints endroits outrageusement violée. De tout cela, il résulte que le bloc s’effrite, et qu’un gouvernement avisé et vigoureux pourrait en profiter pour reconquérir son indépendance. Le nôtre est avisé ; mais personne ne le soupçonne d’être vigoureux. Il ménage également, à la Chambre, les radicaux et les socialistes. Voilà pourquoi la situation parlementaire reste indécise.

Pour ce qui est du Sénat, il n’aura à s’occuper du budget qu’après la Chambre, et, en attendant, il discutera la séparation de l’Église et de l’État. Aucune illusion n’est possible sur le sentiment de l’assemblée, et, au surplus, personne ne s’en fait aujourd’hui ; personne ne doute que la séparation sera votée ; le seul point est de savoir si elle le sera exactement, machinalement, docilement, dans les mêmes termes qu’à la Chambre, de manière que la loi n’ait pas à y revenir et à ce qu’elle puisse être promulguée pour le 1er janvier. Les partisans de la séparation tiennent beaucoup à donner cette étrenne électorale au pays. Ils semblent craignent — le font-ils réellement ? — que la Chambre prochaine ne soit pas aussi entichée de la réforme que l’est celle d’aujourd’hui. Doutent-ils donc du pays, et veulent-ils lui forcer la main ? Mais nous ne reviendrons pas sur des polémiques pour le moment épuisées. Tout ce qu’on peut dire pour ou contre la séparation a été dit, et on aura beau le répéter, l’opinion ou le parti pris de chaque sénateur a peu [de chances d’en être modifié. Eh bien ! si la majorité du Sénat est pour la séparation, qu’elle la vote, qu’elle en prenne la responsabilité. Nous ne lui demandons même pas d’introduire dans la loi beaucoup d’amendemens, car nous ne sommes pas sûr qu’ils en amélioreraient les dispositions