portugaises du continent américain était, certes, beaucoup plus peuplé que l’Union. Toute jeune encore en 1790, celle-ci ne comptait pas 4 millions d’habitans, tandis qu’en 1794, la population du seul Mexique était évaluée à 4 millions et demi. En 1900, toute l’Amérique du Centre et du Sud, les Antilles exceptées, n’avait guère plus de 60 millions d’habitans alors que les Etats-Unis, trois fois moins étendus, en recensaient 76 millions. Encore le dernier quart du XIXe siècle avait-il vu les turbulentes républiques espagnoles s’assagir, leur population et leur richesse se développer. Si les Américains du Sud avaient continué à s’épuiser en des troubles stériles, il n’est pas douteux que ceux du Nord, auxquels les terres vierges commencent à manquer, ne fussent venus s’installer dans leurs pays pour exploiter à leur place les richesses qu’ils laissaient dormir et établir l’ordre qu’ils étaient incapables d’assurer eux-mêmes. Ils les auraient administrés, inondés de leurs capitaux, de leurs colons, qu’auraient suivis des immigrans d’Europe. Ceux-ci, et nombre d’indigènes peu ou point latinisés, que contient encore l’Amérique « latine, » auraient adopté la langue de la race prépondérante. Les élémens espagnols et portugais auraient vite été réduits à l’état de minorité comme l’élément français au Canada. Sur le Nouveau Monde tout entier, sur tous les Nouveaux Mondes, faut-il dire, car l’Océanie a déjà subi le même sort, se fût ainsi étendue uniformément la culture anglo-saxonne.
Pour l’humanité, c’eût été probablement un malheur, car la diversité des tempéramens nationaux, des civilisations, des disciplines éducatrices est l’un des facteurs du progrès scientifique comme du progrès moral. Pour les peuples de culture latine, c’eût été un désastre. Ne formant plus qu’une minorité des plus faibles, cantonnée dans un petit coin du monde, ils auraient perdu toute influence sur ses destinées, auraient été rejetés à l’écart du grand mouvement intellectuel aussi bien que du mouvement économique. Pour la France en particulier, qui, bien qu’étant la moins latine des nations latines, exerce sur elles toutes une sorte de magistrature intellectuelle, c’eût été la perte de son influence philosophique, littéraire et scientifique, qui importe plus qu’on ne le croit souvent à l’extension de sa clientèle économique et, par conséquent, à sa prospérité matérielle.
Notre pays a donc bien des raisons pour suivre avec l’intérêt le plus vif les progrès que font les pays de l’Amérique du