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l’angle mort, jusqu’au moment où la retraite est ordonnée (une heure et demie) en raison du mouvement débordant des Japonais. La 4e batterie dut être abandonnée, les attelages ayant été tués. C’est d’ailleurs ainsi que les Russes ont laissé tant de canons aux mains de l’ennemi.

L’artillerie a quelquefois produit par surprise de grands effets sur des troupes qui, croyant être abritées, ont commis la faute de garder des formations compactes, au lieu de s’espacer par fractions. Le 9 juillet dans une vallée, près de Gaïtchou, les Japonais, avaient rassemblé de l’infanterie formée en masses. Une batterie russe de trente pièces, placée en arrière d’une colline, dirigea sur ces troupes un feu indirect concentrique et produisit en quelques instans des ravages considérables. Quand des réserves approchent de la bataille, il est toujours dangereux de les maintenir massées. Elles doivent être formées en ordre demi-déployé avec des intervalles entre les unités.

Souvent l’artillerie a suffi, à elle seule à rendre infranchissables, pendant le jour, des zones de terrain considérables. Le 23 juillet à Tatchitsao, les Russes occupaient une ligne retranchée de 16 kilomètres en avant de laquelle, à 4 ou 5 kilomètres, se trouvaient des postes d’avant-garde également retranchés. Les Japonais attaquent ces avant-postes qui se replient sur la position principale. Le 24, toute l’artillerie japonaise entre en action et canonne pendant quinze heures sans interruption. Les Russes n’ont mis en ligne que deux régimens d’infanterie et quelques batteries. Après cette canonnade, les Japonais lancent leur infanterie, le feu de l’artillerie l’écrase, elle échoue. Les Russes commettent alors la faute de faire une contre-attaque à la baïonnette. Un régiment perd 500 hommes en quelques instans, et il est forcé de se coucher sur place pour éviter une destruction totale. Il ne put se replier qu’à la nuit. Pendant ce temps, le 1er corps russe maintenait toute la journée l’ennemi sur son front, avec six batteries appuyées à l’aile extérieure par deux batteries d’une division de cavalerie. Pas un seul homme d’infanterie n’est engagé, et cependant les Japonais ne purent pousser leur infanterie à moins de 3 kilomètres des batteries. A mesure que la guerre se prolonge, on constate que, pendant le jour, l’artillerie mène la bataille, tandis que l’infanterie agit surtout de nuit.

La bataille de Lyao-Yang a duré du 29 août au 2 septembre sans que les batteries des deux partis aient fait autre chose que