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d’où ils ne peuvent s’échapper. M. Balfour et ses amis répondent que les Chinois, ainsi transportés, ont agi librement et en connaissance de cause ; que leurs prétendues prisons ont quatre milles de tour ; que, dans trois ans, ils seront rapatriés aux frais des Compagnies minières. Au fond, la question qui préoccupe les esprits est toute différente. Les ouvriers anglais sont furieux parce qu’ils croyaient pouvoir trouver dans ces mines un débouché pour eux-mêmes. Les propriétaires des mines emploient des travailleurs chinois parce qu’ils les paient trois ou quatre fois moins cher qu’ils ne payeraient les ouvriers de race blanche. Il est parfaitement certain que l’Afrique du Sud est, en quelque sorte, fermée à l’immigration anglaise. On demande des servantes, mais on décourage les familles de venir s’établir là-bas. Défense à quiconque ne peut justifier d’un capital d’au moins vingt livres de débarquer au Cap ou à Durban.

L’autre soir, un orateur populaire disait : « Nous avons fait la guerre du Transvaal pour enrichir une vingtaine de Juifs allemands et pour donner du travail à 60 000 Chinois, tandis qu’il y a ici des centaines de milliers d’Anglais qui en manquent. » Les auditeurs baissaient le nez, n’osant ni applaudir, ni se fâcher, car il y en avait là beaucoup qui avaient acclamé la guerre.

4 janvier. — La majorité des libéraux, en admettant qu’ils en aient une, sera-t-elle une vraie majorité si elle n’est indépendante des nationalistes irlandais et de ce qu’on appelle le parti du travail, c’est-à-dire des députés ouvriers ? Ces deux groupes sont, en quelque sorte, étrangers à la politique et poursuivent un but qui leur est propre. Ne leur parlez pas de libéralisme ou de conservation : ils s’en moquent. Ils prêtent leur concours pour un temps au parti qui leur assure quelque avantage immédiat, puis lui tournent le dos en l’injuriant. C’est ainsi que les Irlandais se sont comportés, par exemple, envers les conservateurs, après avoir reçu d’eux la modique somme de près de trois milliards pour racheter la terre aux propriétaires anglais et la transférer aux mains des fermiers irlandais. En ce moment, ils déclarent bien haut qu’il leur faut un Parlement à Dublin. Cependant, comme M. Redmond est presque aussi bon politique que Parnell, il a fait décider que l’on n’exigerait des candidats libéraux aucun engagement formel à l’égard du Home-rule, mais qu’on voterait pour ceux « qui présenteraient des garanties. » Un certain nombre de candidats ont été mis à l’index, entre autres,