d’un millier de ses nationaux ; une société allemande a construit la ligne de Caracas à Valencia moyennant une garantie d’intérêts de 7 pour 100 ; naturellement, cette garantie n’a jamais été effective ; pour la racheter et aussi pour prolonger le chemin de fer jusqu’à Santa Lucia, le gouvernement vénézuélien donna aux actionnaires de la Compagnie des titres de l’emprunt de 50 millions à 5 pour 100 conclu en 1896 ; ces titres demeurèrent aux mains d’un consortium dirigé par la Disconto Gesellschaft ; ce furent sans doute les plaintes de cette puissante société qui décidèrent l’Empereur à intervenir et à mettre une fois de plus la force militaire et navale de l’Allemagne au service de son expansion économique. Depuis longtemps un dossier était ouvert où venaient s’accumuler les griefs : fournitures impayées, sujets allemands molestés, engagemens financiers inexécutés ; depuis 1898 les croiseurs Falke et Vineta ne quittaient guère les côtes vénézuéliennes et l’on remarquait leurs opérations de sondage auteur de l’île Margarita dont le gouvernement de Berlin, disait-on, négociait l’achat. Réelles ou supposées, ces visées allemandes sur une terre américaine provoquaient une violente campagne dans la presse des États-Unis et les relations des deux gouvernemens commençaient à s’en ressentir. Le voyage du prince Henri de Prusse à Washington, sa réception à la Maison Blanche ne donnèrent pas tous les résultats que Guillaume II paraissait en attendre ; le président Roosevelt avait défini clairement la manière dont il comprenait et appliquerait la doctrine de Monroë : les États-Unis ne s’opposeraient pas à ce que les puissances européennes se fissent rendre justice ou payer leur dû par le Venezuela, mais ils n’admettraient en aucun cas l’occupation permanente d’une partie quelconque du sol américain. On était alors à la fin de la guerre sud-africaine ; l’Angleterre redevenait libre de son action ; l’attitude de l’empereur allemand pendant la lutte, son refus de recevoir le président Krüger, témoignaient des bons rapports qui s’étaient établis entre Londres et Berlin ; en Extrême-Orient, l’Angleterre inquiète des progrès des Russes en Mandchou ne marchait d’accord avec l’Allemagne ; il n’était pas jusqu’au Maroc où l’on ne ressentît, au bénéfice de l’Angleterre, les effets de cette bonne entente qui allait s’affirmer avec éclat au Venezuela. Dans les premiers jours de décembre 1902, on vit arriver dans la mer des Antilles seize navires de guerre anglo-allemands qui furent encore renforcés plus tard,
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