point qu’en agriculture comme en industrie, le temps vaut de l’argent ; mais ils avaient compris la nécessité de ne rien brusquer, de courir au plus pressé, en commençant par le commencement, en procédant du simple au composé, du facile au difficile. Et c’est pourquoi ils prirent pour premier champ d’action l’achat des engrais chimiques. C’est là une des industries les plus sujettes à la fraude, et que la loi du 4 février 1888 a essayé de réprimer. Phosphates garantis, contenant 80 p. 100 de sable et d’argile ; noir animal qui n’était qu’un mélange de tourbe pure ou de poudre de schiste ; phospho-guano mirifique, vendu 18 francs les 100 kilogrammes et valant 2 fr. 50 au maximum, on n’en finirait pas d’énumérer les ruses indélicates de certains fabricans plus dignes du titre de chevaliers d’industrie que de celui d’industriels. Mêmes dangers pour les semences : substitution de variétés nuisibles ou de qualités secondaires aux variétés de première qualité ; addition de graines artificielles fabriquées avec du sable et du quartz coloré au moyen de sels de chrome et de cobalt, etc. L’agriculteur ne pense guère à faire analyser, et le marchand l’en empêchait souvent en stipulant que la prise d’échantillon aurait lieu à la gare de départ. En face du syndicat, la scène changea complètement : celui-ci traitait de puissance à puissance avec le fabricant, le contraignant à accepter des conditions de vente et de livraison qui permettaient le contrôle, opérant l’analyse, exerçant au besoin des poursuites.
La question des engrais avait une importance capitale pour nos cultivateurs, obligés de produire sur une terre vieille de deux mille ans, de subir la concurrence des terres vierges de l’Inde et de l’Amérique. Choisir des maisons irréprochables, supprimer des intermédiaires parasites, augmenter les rendemens pour une même somme de frais généraux, initier les agriculteurs à l’emploi raisonné des engrais, voilà le premier résultat obtenu. Du seul fait de leur intervention, les syndicats suppriment pour leurs adhérens les commis-voyageurs en engrais, une des plaies de l’agriculture. Par le syndicat isolé, le paysan achète au prix du demi-gros ; par l’union des syndicats, il obtient le prix du gros : le voilà donc, pour cette question capitale, sur le pied du grand cultivateur de tous les pays. C’est l’application féconde du principe d’économie et de sûreté par l’achat collectif, par la coopération. Mille moyens, un seul but : les procédés des syndicats varient