« évolution » sans terme, ou dont le terme n’apparaît jamais à nos yeux.
Que si vous acceptez cette manière de voir, vous serez amenés à reconnaître que l’« inspiration, » comme disent les théologiens, n’est nullement un fait isolé, dans l’histoire, ni même, à parler franc, un fait rare ; mais bien plutôt un attribut commun à l’espèce tout entière, et l’exercice le plus naturel de l’une des plus constantes prérogatives, et des moins contestables, de l’humanité. « Il est temps de comprendre, en effet, que ce que l’on appelle Révélation n’est pas une révélation surhumaine ; que le révélateur, comme on le nomme, a été précédé d’une multitude d’autres révélateurs ; » qu’une « prophétie » n’est, en définitive, qu’une certaine « intuition » de la vie, et que « le mystère chrétien, enfin, n’est autre chose que la conception de la vie, telle que les hommes pouvaient l’avoir il y a deux mille ans. » Notez qu’au surplus « cette expression de Fils de Dieu, — dont se servent les évangélistes pour désigner Jésus, — n’avait pas chez les Juifs le sens particulier que nous lui donnons aujourd’hui. L’immanence de Dieu dans tous les êtres était une idée si répandue dans le mosaïsme, que cette expression ne rappelait autre chose que cette idée. » En résumé, retenons ceci, que « nous sommes tous fils de Dieu, et que l’Idéal divin peut s’incarner dans tous les hommes. »
« Mais je vais plus loin, ajoute Leroux, et je dis que cette idée de l’incarnation divine en Jésus n’est pas une erreur. Ce n’était pas non plus, certes, une vérité absolue. C’était une vérité relative… Il faut dire que Jésus fut, parmi tous les fils de Dieu que renfermait l’Occident, son fils chéri par excellence. Il fut, comme disent quelquefois les Pères, le Prométhée qui anima du feu divin nos statues d’argile. Il nous donna le mouvement, l’initiation, la vie. Oui, la vie spirituelle nous est venue par lui ; il a donc été réellement, et non par une fiction, par une comparaison, le sauveur de nos âmes. »
Mais enfin, « la Révélation est successive, et le christianisme n’a pas tout révélé… Il y a au fond de notre âme un je ne sais quoi de religieux qui est invincible, quelque chose qui n’est pas le christianisme et qui le juge et l’apprécie. Que savez-vous si ce n’est pas le christianisme lui-même qui se transfigure dans nos âmes ? » C’est bien cela, en effet, et nous pouvons avancer sans crainte que l’inspiration dépasse infiniment la Révélation, puisqu’il est en son