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Page:Revue des Deux Mondes - 1906 - tome 33.djvu/419

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dans un parti pour combattre ce même gouvernement et qui, égaré par les fausses confidences des malintentionnés qui l’entourent, creuse de ses propres mains l’abîme où il va se perdre. »

Lorsque ces observations si motivées parvinrent à Genet, il s’en montra d’autant moins ému que, convaincu d’accomplir un imprescriptible devoir civique, il n’avait, depuis les actes auxquels elles avaient trait, discontinué d’attaquer très vivement ce les hommes qui trahissaient leur devoir en multipliant sous ses pas les obstacles, les difficultés et les dégoûts. » Chaque jour, ses longues et déclamatoires épîtres marquaient son invincible foi dans la vengeance que lui réservait contre Washington la future Chambre des représentans : « C’est de leur sein, écrit-il, rééditant à sa manière l’inscription fameuse du buste de Franklin, que partiront les foudres qui terrasseront nos ennemis et qui électriseront positivement l’Amérique. » Il en voit l’indéniable présage dans l’empressement de ce peuple bon, sensible, reconnaissant, « qui accourt de toutes parts, au-devant de l’envoyé du peuple français, lui prouvant par des cris d’allégresse, par des adresses de félicitations, par des écrits brûlans de patriotisme, que les vrais démocrates sentent parfaitement que leur sort est intimement lié au nôtre, que leur intérêt évident est de s’unir à nous pour abattre le monstre du despotisme, qui a juré leur perte aussi bien que la nôtre. »

L’une des dernières communications que Genet, en sa qualité de ministre de la République française, eut à faire officiellement au gouvernement des États-Unis, avait trait au décret par lequel la Convention nationale déclarait « que le peuple français ne s’immisce, en aucune manière, dans le gouvernement des autres puissances, mais qu’il ne souffrira pas que les autres puissances s’immiscent en aucune manière dans le sien. » Ce fut au nom de ce principe du respect mutuel des gouvernemens, auquel il n’avait cessé de porter les plus graves atteintes, que Genet, sur les plaintes réitérées et sur la demande formelle de Washington, vit mettre fin à sa mission, au moment où il annonçait son intention « de relever le gant qu’on lui avait jeté et d’entamer un combat à mort contre ses ennemis, » en attaquant Washington devant l’Assemblée fédérale « c’et en le forçant à comparaître à la barre pour prouver ce qu’il avait avancé. »