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Amérique qu’il ne pouvait dire jusqu’à quel point cette circonstance in Huerait sur les différends. »

Très vite il n’y eut plus de doute sur le rapprochement de l’Angleterre et des États-Unis. Dès le 5 septembre 1794, Fauchet mande à Paris que « les Anglais ont eu à ce point l’art d’enchaîner, par les facilités commerciales qu’ils lui ont données, ce peuple fait pour la liberté, qu’il est à craindre que les Américains ne se relèvent jamais de ce servage que par la guerre. » Aussi le représentant de la République française ne trouve-t-il point d’expressions assez amères contre ce gouvernement pusillanime et faible, « plus attentif à ne pas se laisser voir en faute qu’à remplir ses obligations. »

Cela n’empêche pas, néanmoins, à certains jours, Fauchet de rendre un très chaleureux hommage au peuple des États-Unis qui, « s’il s’agit de remplir un devoir civique ou d’assurer le maintien de la loi comme en Pensylvanie, — où la création d’un droit d’accise avait provoqué un soulèvement, — se retrouve unanime, toutes les divisions, toutes les teintes d’opinion disparaissant devant ce principe vital de la Constitution américaine que la majorité fait la loi. » Comment, chez un tel peuple, la liberté politique ne fût-elle pas apparue comme assurée d’un long avenir, « puisqu’elle n’aura rien à craindre, ni de l’anarchie qui engendre la concentration des pouvoirs, ni du despotisme qui anéantit l’être moral qu’on nomme peuple, ni des invasions qui détruisent l’État ? »

Si vives que soient les déceptions que lui a causées l’attitude du président, Fauchet ne peut non plus se refuser à constater que la popularité de Washington demeure tout aussi incontestable que la patriotique unanimité mise par la nation américaine à faire trêve à ses dissentimens dès que l’intérêt public l’exige. « Le jour de la naissance de Washington, écrit-il le 26 février 1795, a été célébré, le 23, dans tous les États-Unis... Partout la popularité de cet homme, véritablement l’heureux de son siècle, s’élève, se raffermit de jour en jour et’ triomphe des nuages qui avaient semblé se diriger vers elle... En voyant l’unanimité qui règne dans les signes de la partie de l’opinion publique qui décide ou contient les autres, on tire cette conséquence qu’à moins d’accidens imprévus, rien ne pourra attaquer, avec quelque effet, l’influence de Washington, ni faire impression sur le gouvernement que son nom protège autant que la prospérité qui en a suivi