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des traités excessivement variés. Il n’a pas d’intendant ; il n’a jamais de procès. Il est vice-président du Syndicat des Eaux de la Mina et membre de la Chambre syndicale agricole. » Tel autre, M, Benaouda Hadj Abed, « exploite entre autres propriétés, à Relizane, une ferme dans laquelle plusieurs colons se sont ruinés, et où il fait de belles affaires ; » c’est un homme entreprenant qui, séduit par les incitations de délégués d’une association commerciale, s’est mis à planter un hectare et demi en coton, mais doit renoncer à cette culture parce que celui qui l’y a poussé ne lui en offre qu’un prix insuffisant. Un troisième grand personnage arabe, le bach-agha Si Eddine ben Hamza, de la célèbre famille maraboutique des Oulad Sidi Cheïkh, fait cultiver la pomme de terre sur ses domaines et en a vendu pour 24 000 francs en 1899 au poste militaire d’El Golea. Tel autre personnage de marque, Tekouk (Ahmed ould Cheïk Charef), chef des Senoussya, en Algérie, descendant d’un marabout vénéré vers l’an 1 200 de notre ère, cultive ses vastes domaines « d’après les méthodes les plus récentes au moyen d’un matériel agricole en tous points semblable à celui des cultivateurs européens les plus réputés de la région. Il a su s’attacher un chef de culture français. Il a fait ouvrir de nombreux chemins d’exploitation dans ses propriétés, planter de nombreux arbres fruitiers, capter et aménager une source importante jaillissant au milieu de ses terres. »

Nous arrêtons ici cette nomenclature qui, si nous la poursuivions, comme le fait avec une légitime complaisance M. Ismaël Hamet, ressemblerait à un palmarès de concours agricole. Ce n’est pas uniquement ni même principalement quelques riches propriétaires arabes qui, par goût de la nouveauté ou par intérêt, se prennent à imiter la technique agricole européenne : « ce sont assez souvent des gens sans origines, des cultivateurs intelligens qui, instruits par l’exemple de vrais colons, ont mis à profit les enseignemens du contact européen et ont su, par le travail et l’épargne, conquérir des terres, dont ils n’apprécient que mieux la valeur. »

Cette élévation du niveau agricole indigène n’est pas bornée à une seule province, celle d’Oran, généralement la plus avancée : on la retrouve dans les deux autres ; celle de Constantine, qui est la moins européanisée, en donne elle-même des exemples. Un interprète judiciaire à Jemmapes, M. Victor Mousson, tout en distinguant