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VIII

Pour réfuter ces allégations et celles dont elles étaient le complément, je comptais sur le débat contradictoire avec Bancel, que m’avait promis le Siècle. Bien qu’appelé par les instances pressantes des comités électoraux du Var, je ne quittai point Paris, afin de ne pas manquer au rendez-vous. Mais les jours s’écoulaient, et j’attendais toujours. Le Siècle, sommé de s’exécuter, répondit que « les organisateurs de la réunion, ayant déjà éprouvé deux refus de la part de directeurs de théâtre dont ils voulaient louer les salles, étaient en pourparlers avec d’autres. « Pas de subterfuges ! pas d’échappatoire ! s’écria Emile de Girardin ; nous vous offrons, sans rétribution, une grande salle, rue Le Pelletier, ayant deux entrées, pouvant contenir 800 places, dont 400 seront remises à M. Bancel, 400 autres à M. Emile Ollivier et 37 aux journalistes munis de la carte signée du président du syndicat de la tribune des journalistes. Sans doute, 800 électeurs ce ne sera pas la totalité de la 3e circonscription (au nombre de 35 000) ; mais, avec l’assistance de sténographes exercés, ce sera assez pour que les électeurs absens et la France entière puissent se faire une idée juste (15 mai). » Il n’y avait pas moyen d’échapper à une mise en demeure aussi précise. Le Siècle répondit que « M. Bancel arrivait le lendemain, dimanche, à Paris, et serait à la disposition des organisateurs de la réunion. » Mais le lendemain, ce qui arriva, ce fut une dépêche annonçant que M. Bancel, subitement pris de vomissemens, était retenu dans la Drôme. Les démocrates furent penauds de ces vomissemens, que beaucoup appelèrent des coliques. Ils couvrirent leur déconvenue par un redoublement d’injures.

La lutte, ne pouvant plus avoir lieu dans des réunions contradictoires, ne devint que plus acharnée dans la presse. Parmi les journaux d’opposition, le Temps seul gardait quelque mesure. Nefftzer ne se décidait pas à oublier les sympathies personnelles que, depuis de si nombreuses années, il m’avait manifestées. Il n’était pas libre de m’appuyer, ses actionnaires étant des ennemis déclarés de l’Empire, mais il trouvait que j’avais raison et me combattait à peine. Cela déplut au jacobin Henri Brisson, qui lui écrivit :