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Page:Revue des Deux Mondes - 1906 - tome 34.djvu/470

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des événemens qui ont suivi son retour en Europe, et notamment des nombreux séjours qu’il a faits à Paris, pendant les plus tragiques années de la Révolution.

Du premier chapitre on ne saurait donner une idée plus exacte, me semble-t-il, qu’en le comparant à un chapitre de Gil Blas ou du Roderick Random de Smollett, mais en ajoutant qu’il y a toujours, chez Whaley, un accent particulier de véracité à la fois fanfaronne et quasi honteuse, le ton d’un homme qui voudrait bien se vanter, et qui, en même temps, est forcé de reconnaître que de plus malins que lui l’ont conduit par le nez. Il raconte d’abord que, lorsqu’il avait seize ans, sa mère, désirant qu’il terminât son éducation, l’a envoyé en France, sous la garde d’un précepteur qui lui avait été recommandé comme un homme de tout repos. Dès le lendemain de l’arrivée à Paris, le précepteur propose à son élève de l’emmener au théâtre ; mais l’élève, « pour certaines raisons, » préfère rester à l’hôtel ; et quand le précepteur revient du théâtre, à minuit, il trouve Whaley « en très fâcheuse compagnie. » Sur quoi le pauvre garçon s’inquiète de la réprimande qu’il prévoit pour le lendemain matin ; et il est tout heureux de découvrir que son maître, en fait de reproche, le blâme seulement de se faire tant de souci « pour une bagatelle. » Cette largeur d’esprit, nous dit-il, « eut vite fait de me réconcilier avec le caractère de mon précepteur, si bien que, depuis lors, nous vécûmes ensemble dans les meilleurs termes. »

De Paris, les deux amis se rendent à Auch, où le précepteur a demeuré autrefois, et qu’il représente à son élève comme la ville de France où il pourra le mieux « apprendre le français, et se perfectionner dans les arts de l’équitation, de l’escrime, et de la danse. » Whaley loue donc, à Auch, une « élégante maison ; » mais il en loue aussi à Cauterets, à Bagnères, et à Tarbes, pour plus de variété. « Toutes ces maisons n’étaient qu’à quelques lieues l’une de l’autre ; et, dans chacune, j’avais soin que les honneurs de ma table fussent faits par une favorite. Mon précepteur, de son côté, voulut suivre mon exemple ; en conséquence de quoi il prit sous sa protection une autre beauté, avec laquelle il visita, tour à tour, mes diverses maisons. Mais bien que nos goûts et nos penchans, au sujet du beau sexe, fussent parfaitement pareils, je crus m’apercevoir que, en général, nous nous entendions mieux de loin que de près ; et, dès ce moment, sa visite à l’une de mes résidences fut toujours, pour moi, un signal d’avoir à me transporter dans une autre. »

L’auteur nous décrit, au passage, quelques-unes des personnes