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à penser, à méditer et à exercer le jugement en habituant journellement les élèves à se rendre compte par une analyse de plus en plus approfondie de quelques-uns de leurs actes d’abord, puis progressivement de ceux d’‘autrui, en se plaçant dans les conditions particulières de temps, de lieu, de milieu, de tempérament, d’état d’âme, de mobiles, etc., etc., qui les ont influencés et déterminés, sans perdre de vue, que l’on ne peut connaître exactement tous ces élémens que pour ses gestes propres, ceux des autres, même quand ils sont contemporains, présentant toujours des côtés hypothétiques et des faces incomplètement éclairées.

Etendre la même méthode à des questions plus générales, à des ensembles, familiariser progressivement les jeunes gens avec la précision des analyses, la rapidité des synthèses et des solutions, tels sont les principes qui en compléteront l’application.

Un exemple emprunté à la pédagogie de l’école primaire résumera l’économie de cette instruction.

« Choix d’un itinéraire. »

Se rendre d’un point à un autre, dans une intention à indiquer : objet à porter, promenade, secours à apporter, visite, etc., etc. Plusieurs chemins y conduisent. Demander à l’élève celui qu’il prendra de préférence, en lui faisant examiner les motifs de son choix d’après les élémens ci-après : but, distance, état relatif de viabilité, saison, température, temps, heure de la journée, convenance personnelle (désir de passer par tel ou tel point, telle ou telle rue, d’arriver vite ou lentement), etc., etc. Questions similaires sur ses occupations à l’école et au dehors ses jeux, etc., etc.

Envisager ensuite des situations hypothétiques exigeant une décision, dont on indiquera d’abord les mobiles à l’élève et que, plus tard, il aura à rechercher lui-même.

Ces erremens devront prendre place dans les programmes des écoles, des cours, des examens et des concours. Une large part y sera faite à la pensée, à la méditation et à l’exercice du jugement et du discernement.

C’est aussi l’unique moyen de développer la personnalité et le caractère, et de mettre un terme à la routine, dans laquelle s’enlizent nos facultés les plus précieuses, pour la remplacer par la confiance en soi, et donner un large essor à l’initiative réfléchie et à l’esprit d’entreprise, à ces qualités qui forment le