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Page:Revue des Deux Mondes - 1906 - tome 34.djvu/923

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anglais se décidera peut-être à créer et à doter en face de la vieille Université protestante de Trinity College, donnant ainsi au monde, une fois de plus, l’exemple d’un bel et vrai libéralisme !


V

Ce n’est que justice de dire que tous ces efforts faits pour fortifier la culture générale du prêtre ont largement contribué au succès rencontré, et à la transformation opérée, dans le sein du clergé irlandais, par ces mouvemens récens, ces nouvelles tendances des esprits qui se sont fait jour en Irlande depuis dix ou quinze ans. L’Irlande a compris, depuis la crise du home rule, qu’à se laisser trop longtemps absorber par la politique et l’agitation, elle compromettait sa nationalité menacée par l’anglicisation, et que c’était maintenant le premier de ses devoirs de restaurer au pays son individualité nationale, en le rattachant à ses traditions, à son histoire, à son langage, en lui refaisant une vie propre au point de vue psychologique et social : de là d’abord le mouvement « gaélique, » qui vise à régénérer, à « renationaliser » l’âme irlandaise ; puis, parallèlement, un mouvement « économique, » qui s’efforce de rendre au pays par le self help, la coopération et l’enseignement technique, le caractère et les formes économiques qui le sauveront de la ruine matérielle. Il y avait là. de quoi faire réfléchir le clergé et lui inspirer quelque salutaire examen de conscience. N’avait-il pas lui-même abusé de la politique et fait trop longtemps passer les revendications agraires ou constitutionnelles avant la réforme intérieure et l’éducation de l’individu ? N’avait-il pas inconsciemment favorisé les progrès de l’anglicisation par cet esprit d’opportunisme qui le faisait toujours regarder vers l’Angleterre pour toute mesure de réparation ? Le ’ait est que très vite il fut touché de l’esprit nouveau. Son horizon dès lors se déplace, s’élargit. Son activité temporelle s’oriente de moins en moins vers la politique et de plus en plus vers les réformes intellectuelles et sociales, vers le travail nécessaire de l’éducation nationale, d’autant plus aisément que la nécessité de son intervention politique diminue elle-même peu à peu. S’il se trouve encore aujourd’hui de ses membres pour contester la possibilité d’une renaissance