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sociales. F. W. Jowett fonde à Bradford une branche de l’Independent Labour Party, dirige la commission municipale d’hygiène. En récompense de son dévouement à la cause de « l’amélioration sociale, » pour prendre une formule qui lui est chère, Bradford l’a envoyé à Westminster défendre un certain nombre de mesures, que l’alderman a exposées dans un programme modéré. P. Snowden remplissait des fonctions modestes dans l’administration des finances, lorsqu’un fâcheux accident de bicyclette l’oblige à prendre sa retraite prématurément. Il occupe ses loisirs ; il lit ; il travaille. Bientôt il apporte à l’Independent Labour Party son concours ardent et devient un de ses conférenciers les plus écoutés. P. Snowden se distingue de ses collègues par un dogmatisme plus rigoureux. Mais à ce concours théorique s’ajoutent les services pratiques qu’a rendus le président de l’Independent Labour Party, comme conseiller de paroisse, conseiller municipal, administrateur du School Board. Lui aussi, le plus intellectuel, le moins ouvrier du parti, a cependant franchi tous les degrés de cette administration locale, dans lesquels les Anglais apprennent leur devoir civique, à l’école des réalités.

À cette petite phalange d’intellectuels pratiques s’oppose la nombreuse cohorte des Trade-Unionistes.

Quelques-uns ont joué un rôle important dans l’histoire des classes ouvrières : J. Burns, le premier ministre qu’aient fourni à l’Angleterre les travailleurs manuels, une silhouette petite et carrée, un visage taillé à coups de serpe, à la mâchoire forte, aux lèvres serrées, sous la moustache militaire, au-dessus de la barbe en pointe ; Will Thorne, le fondateur du néo-Trade-Unionisme, une physionomie d’ascète, une de ces consciences inflexibles qui ont la religion du socialisme.

Will Thorne est né, en 1862, dans la misère. Son père et sa mère travaillaient, l’un et l’autre, aux environs de Birmingham, dans des briqueteries, la plus pauvre des industries anglaises. A sept ans, il tourne la roue d’un tisseur de cordes. A huit ans, il suit ses parens à la briqueterie. L’année suivante, le père meurt d’un accident de travail. Will Thorne aide sa mère à faire vivre les quatre frères ou sœurs. Sans trêve, ni repos, il travaille.