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unités, le double appareil des canaux d’arrosage et des canaux de drainage fonctionne désormais régulièrement et efficacement, il permet d’irriguer toute l’année les terres soumises à l’irrigation pérenne. Enfin, une fois le système inauguré par Méhémet Ali rendu efficace et complété, l’antique procédé des bassins fut à son tour remis en état et perfectionné.

Plus naturel et plus simple que le nouveau, ce mode d’irrigation laissait alors moins que lui à désirer. Les ingénieurs anglo-égyptiens, dont l’attention était absorbée par les travaux d’irrigation pérenne du Delta, le considéraient comme provisoire et destiné à être, tôt ou tard, remplacé ; mais la mauvaise crue de 1888 qui laissa en Haute-Égypte 110 000 hectares sans eau et entraîna 300 000 livres égyptiennes[1] de perte pour le Trésor, leur rappela que les bassins qui occupaient une surface encore si considérable ne pouvaient être impunément négligés. Le colonel Ross, alors chef du service, entreprit donc immédiatement leur aménagement sur un plan rationnel.

En poursuivant, avec un grand esprit de suite et beaucoup de patience, cette œuvre technique, les ingénieurs anglo-égyptiens ne perdaient pas de vue l’organisation administrative de leur service. Depuis plusieurs années, grâce aux dispositions législatives ou réglementaires qu’ils inspirèrent, grâce surtout à la manière dont ces mesures furent appliquées, une administration active, éclairée, prévoyante, économe tire le meilleur parti possible du fleuve, dont elle distribue les eaux suivant des règles générales et équitables.

La fonction des agens du département de l’irrigation est difficile autant que laborieuse. Le système de travaux qu’ils administrent est encore incomplet et perfectible, ils ont à l’améliorer, à le développer et même à le transformer, ils ont surtout à l’entretenir et à le réparer. Aux causes générales qui, dans tous les pays, contribuent à la détérioration des travaux de voirie, des causes particulières s’ajoutent en Égypte. Très sèche et très friable, la terre battue dont se composent les digues se désagrège et se fend facilement. Le limon que charrie le courant se dépose dans les canaux qu’il faut curer souvent pour qu’ils ne s’engorgent pas. L’eau, imparfaitement drainée, sature les bas-fonds ; ailleurs elle s’évapore au soleil, laissant derrière elle

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