Page:Revue des Deux Mondes - 1906 - tome 35.djvu/453

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

quelques-unes d’entre elles sont destinées à vivre, ce sont encore les discussions, les interprétations, même erronées, les appréciations, même divergentes, et les controverses des critiques, qui entretiendront autour d’elles le mouvement de l’opinion, c’est-à-dire une atmosphère de vie et de jeunesse.

Aussi tous ceux qu’intéresse l’histoire du théâtre feront-ils bien de mettre dans leur bibliothèque, à côté des Quarante ans de théâtre[1] de Francisque Sarcey, dont on a publié récemment le huitième et dernier volume, les deux volumes pareillement posthumes d’Etudes de critique dramatique[2] de Gustave Larroumet. Professeur disert, Larroumet conservait, la plume à la main, tous ses dons de facilité heureuse. Fort instruit, et des choses de la vie comme de celles de la littérature, doué d’une intelligence plus souple encore que pénétrante, il plaisait par l’aisance du tour, par une abondance toujours prête, par l’agrément d’une forme élégante sans excès de subtilité ni de raffinement. M. Adolphe Brisson, qui a recueilli au journal le Temps la succession de Sarcey et de Larroumet, publie à son tour, sous le titre de Le Théâtre et les mœurs[3], une première série de ses articles. On les relit avec plaisir et profit, et on ne cesse d’y goûter ces qualités précieuses entre toutes : une conscience scrupuleuse, une constante recherche de l’information exacte et complète, un souci d’entrer dans le dessein de l’auteur et de l’expliquer congrûment au public, une courtoisie parfaite, un désir charmant de ne faire de peine à personne. Et voici déjà trois volumes des Propos de théâtre de M. Emile Faguet[4]. Les critiques d’autrefois adoptaient volontiers des titres un peu ambitieux et destinés à donner le change sur ce qu’il y avait dans leurs études de nécessairement fragmentaire. Cela s’appelait Cours de littérature dramatique, ou bien Histoire du théâtre en France ; mais ces appellations ronflantes n’y faisaient rien ; et ce n’étaient malgré tout que des morceaux détachés, où manquaient précisément la méthode qui fait un « cours » et la suite qui fait une « histoire. » Les critiques de maintenant recherchent les titres les plus modestes et se soucient uniquement de trouver une étiquette appropriée à leur manière. M. Jules Lemaître, en qui s’est personnifiée naguère la critique impressionniste, ne promettait au lecteur de lui donner que ses Impressions de théâtre ; M. Faguet nous livre ses « propos » de théâtre

  1. Quarante ans de théâtre, par Fr. Sarcey, 8 vol. in-12 (Bibliothèque des Annales).
  2. Études de critique dramatique, par G. Larroumet, 2 vol. in-16 (Hachette).
  3. Le théâtre et les mœurs, par M. Ad. Brisson, 1 vol. in-12 (Flammarion).
  4. Propos de théâtre, per M. Emile Faguet, 3 vol. in-18 (Société française d’imprimerie et de librairie).