donné lieu à des abus ; car le Parlement de Provence rendit un arrêt (30 juin 1684), confirmant diverses transactions passées auparavant entre les prieurs de l’ordre et les magistrats de la ville, concernant la régie des aumônes destinées au rachat des esclaves. Ainsi, la convention de 1602 stipulait que la caisse serait déposée dans l’église de la Sainte-Trinité et fermée par une serrure à trois clefs ; chacune remise à l’une des parties intéressées. On ne devait l’ouvrir que lorsque le supérieur ordonnerait de faire une rédemption générale. D’après celle de 1627, les Pères quêteurs ne devaient rien promettre aux esclaves libérés, sans la participation du prieur. Les gratifications devaient leur être remises, seulement après qu’ils auraient assisté à la procession[1].
À ces deux ordres rédempteurs vinrent se joindre au XVIIe siècle les Lazaristes. Le besoin de secours aux captifs se faisait sentir ; car, soit par l’effet de l’excès des richesses, soit plutôt par suite des divisions et procès entre les deux ordres rivaux, ils s’étaient bien relâchés de leur zèle. Saint Vincent de Paul, alors qu’il était précepteur des enfans de Philippe de Gondi, général des galères, avait songé d’abord à proposer au roi de France, comme le cardinal Ximenès l’avait fait jadis à Charles-Quint, de réduire Alger et Tunis par la force[2].
Ayant été lui-même esclave dans cette dernière ville, il éprouvait comme Cervantes une profonde commisération pour les captifs des Barbaresques et constatait, en 1654, que les Mathurins avaient depuis tantôt dix ans discontinué leurs rédemptions. Il conçut donc le projet de les secourir, dans l’intervalle des rachats, c’est-à-dire d’assister ceux qui étaient malades et de fortifier dans la foi ceux qui étaient défaillans. D’autre part, la supplique des captifs français à Tunis (1631) au roi de France avait ému Louis XIII et la pitié avait gagné plusieurs grandes dames de la Cour et des bourgeois de Paris. Ayant reçu du Roi et de Mme d’Aiguillon deux grosses donations, et après avoir envoyé comme éclaireurs deux prêtres de la mission à Alger, le bon M. Vincent organisa la « mission d’Afrique. » Elle avait pour objet, moins de faire des rédemptions que d’exercer le ministère de prédication, des sacremens et de la charité auprès des esclaves