Aller au contenu

Page:Revue des Deux Mondes - 1906 - tome 35.djvu/959

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

qu’il éprouve à négocier avec une puissance étrangère, et à causer avec elle des droits de la France. Avec qui et sur quoi négocie-t-on d’ordinaire, si ce n’est avec une autre puissance, et sur des droits qu’on cherche à mettre d’accord avec les siens ? Mais passons. Si la papauté avait la moindre puissance matérielle, M. Clemenceau en parlerait autrement. Ce passage de son discours est négligeable ; celui qui précède a plus d’intérêt pour nous. Mais que veut-il dire ? M. Clemenceau semble faire bon marché de la loi de séparation, et consentir assez cavalièrement à ce qu’il n’en soit plus question, puisqu’il s’écrie : « N’en parlons plus ! » Il propose le retour au droit commun. C’est le système de M. Jaurès ; est-ce celui du gouvernement ? On aimerait aie savoir. Le jour même où M. Clemenceau parlait à La Roche-sur-Yon avec tant de pompe et de cérémonie, et, à ce qu’on assure, au milieu d’applaudissemens frénétiques, M. Sarrien, qui n’est que président du Conseil, s’exprimait plus modestement à Louhans. « Nous sommes décidés, disait-il, à assurer l’exécution de la loi sans faiblesse : nous ne voulons pas de persécution religieuse, mais nous ne voulons pas non plus la soumission de l’État devant les sommations impérieuses de l’Église. » Ainsi M. Sarrien est pour l’application de la loi, et M. Clemenceau est pour le droit commun. Comprendra qui pourra, parmi tant de contradictions, la vraie pensée du gouvernement, à supposer qu’il en ait une. Nous craignons qu’il n’en ait plusieurs, ce qui embrouille.

M. Clemenceau doit prononcer prochainement un nouveau discours, et, comme il s’adressera cette fois à ses électeurs du Var, peut-être, dût le pittoresque y perdre, s’abandonnera-t-il moins à ses souvenirs de jeunesse et tiendra-t-il un langage plus exclusivement politique. En attendant, nous restons dans le vague. M. Briand, qui avait beaucoup parlé après l’encyclique Gravissimo, s’est aperçu depuis que le silence était d’or : il ne dit plus rien, et sans doute il réfléchit. La plupart de nos ministres imitent cette réserve. Seul, M. Clemenceau semble être dans le cabinet le ministre de la parole ; mais après qu’il a parlé, on se demande ce qu’il a dit. Jusqu’à ce jour, le gouvernement a espéré qu’il aurait des associations cultuelles. Celles de Puymasson et de Culey sont, si l’on veut, un beau début ; mais il est à craindre que la suite n’y réponde pas. M. des Houx promet toujours, et ne donne rien. Peut-être parviendra-t-on à susciter quelques douzaines d’associations schismatiques aux yeux de l’Église, et irrégulières aux yeux de la loi. On en cite déjà quatre ou cinq. Après ? Nous voudrions savoir ce qu’on fera après, et c’est ce sur quoi on