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post-scriptum, j’y ai trouvé de telles difficultés que j’ai été sur le point de m’en dispenser. En premier lieu, plus j’ai examiné la chose de près, et moins j’ai conçu l’utilité de cette addition. Vous paraissez craindre qu’on ne suppose au Roi l’intention de favoriser les prétentions parlementaires. Ne croyez pas cela, monsieur le comte : il n’y a pas de bonhomme en France qui s’imagine que vos Princes travaillent pour ressusciter cette petite opposition bourgeoise, qui les ennuyait tant. Je vis l’effet du livre des magistrats français, lorsqu’il parut en Suisse ; on crut tout bonnement que les Princes français, ne se trouvant point encore assez instruits par les circonstances et assez persuadés des concessions qu’elles exigeaient, avaient vu de mauvais œil un écrit où les Droits du peuple étaient mis dans un trop grand jour. Ce fut une des raisons qui m’engagèrent à m’emparer de cet ouvrage, et à dire qu’il méritait la confiance des Français, parce que l’air de défaveur qui l’environnait, prouvait aux Français que ce n’était point un ouvrage de commande.

« Mais, à supposer même l’utilité de la pièce, je me suis trouvé arrêté par d’autres considérations, lorsque j’ai voulu mettre la main à l’œuvre. Vous n’avez pas songé, monsieur le comte, à me citer les passages où ces messieurs ont mis les Parlemens au-dessus de la nation . Ma mémoire, quoique assez complaisante, ne mêles rappelle point ; je croyais même avoir copié des textes contraires. Je ne puis plus me procurer le livre ; je me suis trouvé très embarrassé, car rien ne dispense (lorsqu’il s’agit surtout de telles extravagances) de citer les textes ou les pages. D’ailleurs, monsieur le comte, le Roi n’a besoin que de la bienveillance universelle . Est-il bien nécessaire de rappeler d’anciennes rancunes et d’exciter des souvenirs anciens ? Si mon livre venait à exaspérer un seul cœur contre le Roi de France, j’en serais inconsolable. D’un autre côté, votre avis qui est celui du Roi m’a paru si respectable, que je n’ai pu me déterminer à revenir en arrière, surtout après avoir promis (à la vérité, sans y songer assez). J’ai donc écrit mon post-scriptum et je l’ai refait cinq fois avant d’avoir été à peu près content de moi. Comme je serais fâché que Sa Majesté ne le connût que par l’impression, j’ai l’honneur, monsieur le comte, de vous en adresser ci-joint une copie.

« Je désire de tout mon cœur avoir réussi. Mais si je n’avais pas eu ce bonheur, du moins complètement, je ne vous en prierais