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en correspondance avec vous avant d’avoir livré mes additions ; mais, peut être aussi, je serais tombé dans ces détails, et j’aurais eu l’air moins désintéressé, moins étranger. Je réponds au moins de ma bonne volonté.

« J’ai été infiniment touché du nouveau déplacement de Sa Majesté. Grand Dieu ! les rois laisseront-ils donc pousser le Roi jusqu’au Spitzberg ? Tant de malheurs m’inspirent l’intérêt le plus profond et le plus français. Quelquefois, je me sens abattu ; mais l’espérance vient ensuite me ranimer, et je compte toujours sur un changement heureux.

« Je ne saurais trop vous remercier, monsieur le comte, de l’intérêt que vous voulez bien prendre à ma situation. c’est bien à contre-cœur que je jette les yeux sur l’étranger ; car ce qu’un honnête homme a de mieux à faire dans ce monde, c’est de servir son prince. Mais, depuis mon aventure, je crains fort de n’avoir plus le choix. La politique défendant à mon souverain de m’employer tant que cet ordre de choses durera, qui sait quand il lui sera permis découler à mon égard sa justice et sa bonté ordinaire ? Si par hasard, il se présentait quelque chose d’avantageux, il est bon que vous puissiez répondre aux premières questions. Je suis originaire de Nice, et plus anciennement de Provence. Je suis fils d’un homme célèbre dans son pays, Président du Sénat de Savoie, et titré par le feu roi après soixante ans de services continués sous trois règnes. Ma famille est admise à la Cour. Sur tout le reste, je n’ai rien à dire, excepté qu’elle est très nombreuse et toute royaliste. Au reste, monsieur le comte, je serais au désespoir que vous prissiez ce qu’on appelle des peines pour cet objet, qui d’ailleurs n’est pas pressant ; mais s’il se présentait quelque heureuse occasion de m’assurer une existence, je suis persuadé que vous la saisiriez. Je dois vous répéter, monsieur, que si le Roi avait la bonté de s’y intéresser, il est tout simple que cette faveur soit précédée de toutes les informations préliminaires qui doivent la motiver. Je les provoque même.

« Je vous dois encore des remerciemens, monsieur le comte, pour avoir mis dans ma requête à Sa Majesté : « soit fait ainsi qu’il est requis. » Je me suis reproché l’enfantillage de cette demande qui est sortie de mon cœur malgré moi ; mais, puisque j’ai fait cette folie, prenez garde, je vous en conjure. Si mes intentions n’étaient pas remplies purement et simplement, je serais inconsolablement humilié.