Page:Revue des Deux Mondes - 1907 - tome 37.djvu/708

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de quinze ans, rien qu’en payant son loyer. Il avait fini par comprendre, et par accepter. Il venait s’établir. Son jardin aujourd’hui est prospère, ses fils et ses filles poussent en vigueur et en santé. Il a du pain, il a des légumes, il a du lard, et il songe à entourer son domaine d’une palissade.

Le Cercle d’études peut être quelquefois un cercle d’études plus uniquement théorique. On connaît le Sillon, cette œuvre installée boulevard Raspail et qui est comme une immense famille de cercles d’études masculins, puisqu’il y a dans Paris quarante-cinq cercles composés de quinze membres, chacun, ouvriers et employés, et cinq cents en province. Le Sillon, créé par M. Marc Sangnier, ancien polytechnicien et ancien officier d’artillerie, pense qu’en dehors du christianisme, il n’y a ni égalité ni fraternité, mais simplement la lutte des intérêts et la lutte pour la vie. La foi catholique, loin d’être inconciliable avec la foi démocratique, la complète et la soutient. On ne fonde pas une société sur la haine, on ne la fonde que sur l’amour. Le Sillon tente donc une œuvre d’éducation démocratique et chrétienne, et il donne à son action trois phases : d’abord agir sur l’opinion publique, c’est-à-dire changer la mentalité de l’électeur ; ensuite multiplier les œuvres économiques ; cela accompli, aborder la politique.

Il n’y a pas de femmes parmi les membres du Sillon. Cependant, en 1903, les mères, les femmes, et les sœurs des jeunes gens du Sillon se réunirent chez l’une d’elles une fois par semaine, pour tenir la correspondance à jour et aider à une enquête menée sur la coopération. Elles entendaient sans cesse parler autour d’elles de questions sociales, de problèmes sociaux : et tout cela ne leur était pas très clair. Elles demandèrent qu’on diminuât leur ignorance, et très volontiers on accéda à leur désir. Il y eut donc chaque lundi une causerie familière, pour les instruire. Toute personne présente pouvait interroger le conférencier. Au bout de quelque temps, il fut décidé que chaque lundi, à l’ouverture de la causerie, on lirait un rapport qui résumerait le travail de la causerie précédente, et que ce rapport serait rédigé, à tour de rôle, par une des auditrices. De plus, les dames notaient par écrit ce qu’elles entendaient dire de telle ou telle œuvre, de tel ou tel mouvement social, de tel ou tel projet économique, et, le lundi, priaient le conférencier de les renseigner. En 1905, ce groupement, dont les membres possédaient maintenant