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de sa clarté exceptionnelle et de l’autorité intellectuelle et morale de ses littérateurs et de ses savans.

Le français fut alors accepté comme la langue universelle des gens cultivés, et il parut appelé à prendre la place occupée autrefois par le latin dans le monde jusqu’au XVIIIe siècle.

Cependant, l’institution de l’Université impériale, aux débuts du XIXe siècle, eut pour conséquence, en France, l’établissement d’un système officiel et général de grades, diplômes et titres professoraux et administratifs. De là l’organisation d’examens et de concours, rendus obligatoires pour l’accès aux fonctions et à certaines professions, telles que celles de médecin, avocat, pharmacien, etc.

A la même époque, on crut qu’il était possible de fixer d’une manière définitive les principes fondamentaux de toute législation, de toute connaissance, et en particulier ceux de la langue, grammaire et orthographe. C’était le temps où Condillac, ramenant tout à la logique, déclarait que « l’art de raisonner se réduit à une langue bien faite. » Sans discuter la valeur de cette philosophie un peu étroite, qui tenait compte seulement de la forme extérieure des sciences et non de leur contenu positif, il est certain que ce fut alors qu’ont été constituées par voie de règlemens une grammaire et une orthographe officielles, imposées à l’enseignement. Elles furent adoptées par presque tous les écrivains et imprimeurs. On conserva, d’ailleurs, par une sorte d’entente tacite, l’habitude déjà prise de se conformer au Dictionnaire de l’ Académie : c’était sous-entendre que celle-ci devait se conformer à l’usage commun, et non lui imposer ses idées particulières.

Il y a trois quarts de siècle, la grammaire de Noël et Chapsal était ainsi devenue à peu près un véritable catéchisme d’enseignement primaire et secondaire, catéchisme complété par des exercices systématiques de cacographie.

Ce n’est pas qu’il ne se soit élevé de tout temps des réformateurs pour signaler les inconvéniens et les abus de cette routine officielle. Leurs protestations ont même été fort vives au temps de Louis-Philippe ; et elles n’ont guère cessé de se produire. Mais c’est de nos jours que les critiques sont devenues plus dures, et la polémique plus ardente. Des réformes de plus en plus étendues ont été proposées ; elles ont même été mises en œuvre dans les journaux dits « réformistes, » et dans l’impression de quelques ouvrages privés.