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Page:Revue des Deux Mondes - 1907 - tome 37.djvu/756

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vertu de principes rationnels, ou préjugées tels par un petit nombre de fonctionnaires, sans mandat des écrivains et auteurs, c’est-à-dire des personnes qui pratiquent et font en réalité la langue écrite, dans des œuvres d’une autorité reconnue ? Ces fonctionnaires, réunis en commission administrative, ont-ils le droit et l’autorité nécessaire pour promulguer un nouveau code de la langue écrite, ou même de la langue parlée, code obligatoire comme ceux votés par les assemblées législatives : je dis obligatoire pour tous les professeurs et instituteurs des enseignemens primaire, secondaire et supérieur ?

Telles sont les alternatives, nullement imaginaires, mais qui existent aujourd’hui pour la réalisation de la réforme de la langue française.

En fait, la constitution d’un semblable code de la langue écrite n’avait jamais été proposée jusqu’ici en France : ni au moment de la réforme des humanistes du XVIe siècle, ni lors de celles des siècles suivans, soumises à l’autorité purement morale de l’Académie Française. Il est certain que les réformes proposées par cette dernière avaient été préparées par l’évolution naturelle de la langue, et librement acceptées. Pour la première fois, dans notre histoire, on voudrait procéder d’une façon différente, en préjugeant a priori la nécessité de certaines formules de réformes, contraires à l’usage, délibérées en commission, non d’auteurs, mais de pédagogues, et proclamées sous l’étiquette trompeuse de « réforme rationnelle. »

Leurs promoteurs élèvent la prétention d’imposer leurs idées par des arrêtés ministériels, sans se préoccuper autrement de l’opinion publique.

Ces réformistes appuient leur prétention sur deux ordres d’argumens : les uns tirés de l’intervention de la loi dans l’emploi des poids et mesures, pour les définir et les rendre obligatoires ; les autres appuyés sur les systèmes actuellement suivis, dans l’Instruction publique, pour les concours et examens de tout degré.

Les objections opposées à ces raisonnemens sont : les unes intrinsèques, c’est-à-dire tirées de l’étendue non définie et du développement ultérieur et inévitable des réformes ; les autres extrinsèques, tirées de la légalité contestable des réformes, et des résistances que subirait leur application obligatoire.

Je dis d’abord : l’étendue et le développement ultérieur des