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Nous le retrouvons dans Il Santo, dans ce livre qui vient de préoccuper toute la presse européenne et dont la traduction a paru ici même. Pierre n’a pas embrassé la vie religieuse dont il ne se sent pas digne et qui ne répond pas à toutes ses aspirations. Il s’est retiré au couvent de Subiaco, auprès d’un jeune bénédictin qui est son directeur spirituel et intellectuel : là il mène une vie de travail et de pénitence, cultivant le sol de ses mains, se nourrissant d’alimens grossiers et passant des nuits entières en prière sur la montagne. Parfois ses sens s’émeuvent encore ; mais cette faiblesse ne lui est qu’une raison de s’humilier plus profondément en Dieu. Il est désormais tout absorbé par l’idée qu’il a d’une mission divine à remplir dans l’Église catholique, et son âme est si purifiée que d’instinct tous le nomment le Saint. Une fois seulement, Jeanne Dessalle parvient à le rejoindre, et tout ce qu’elle obtient, c’est un geste du Saint lui montrant le mot Silentium écrit sur la paroi d’un sanctuaire, l’ordre de s’adonner aux œuvres de charité et la promesse de l’appeler quand son heure sera venue. Chassé de Subiaco par un supérieur à idées rétrogrades, Pierre Maironi, qui est devenu Benedetto, veut se retirer dans la solitude de la petite ville de Yenne ; mais sa renommée de sainteté l’y poursuit et l’y décèle. La foule lui demande chaque jour des sermons et des miracles, et il lui prêche le renoncement, l’amour de Dieu et la pratique des grandes vertus dans les petits devoirs quotidiens. Yenne devient, malgré Benedetto, un véritable lieu de pèlerinage et l’autorité ecclésiastique s’en émeut. C’est à Rome enfin que Benedetto se rend, à Rome où il a toujours senti que sa mission devait s’exercer, et où, après avoir dévoilé à des incroyans inquiets l’âme même de l’Église parfois obscurcie par des impuretés et des scories humaines, il en appelle au Père commun, au Souverain Pontife. Ce n’est pas ici, où nous ne faisons qu’analyser, le lieu d’apprécier ce qu’il lui dit et ce qu’il lui demande. Sa mission accomplie, Benedetto n’a plus qu’à mourir, c’est-à-dire à s’en aller vivre de la vraie vie ! Epuisé par les mortifications, et surtout par le travail intense de sa pensée toujours agissante, il meurt en effet bientôt, léguant à ses amis l’enseignement sublime et très simple de ses dernières paroles et surtout l’enseignement de sa vie : et c’est cet exemple d’une vie sainte, c’est-à-dire abandonnée à l’amour de ses frères et consacrée d’une façon active et profonde à la glorification du Seigneur, qui,, après avoir fait l’édification de l’élite et