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Page:Revue des Deux Mondes - 1907 - tome 37.djvu/834

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et non pas de la nature. En aimant, il sait qu’il coopère à l’action de la volonté souveraine et créatrice, et cette pensée l’exalte.


Quoi qu’on pense de l’amour, ii est une force comme l’attraction, il est une force qui a son origine dans la puissance supérieure elle-même, qui donne son origine à la vie, une force qui attire tout l’homme, qui non seulement précipite la course de son sang, le mouvement de son instinct et l’élan de sa volonté, mais qui transforme aussi et qui exalte ses pensées et ses sentimens par l’idée d’une félicité supérieure à toutes celles qu’il a pu auparavant concevoir et désirer.


Que la loi d’amour lui soit véritablement donnée par Dieu lui-même, ce n’est pas seulement, pour le poète, une idée au sens intellectuel du mot, c’est un véritable sentiment. Mieux encore : l’objet même, l’objet sensible de son amour, lui est désigné par Dieu. Je ne sais quel Lohengrin mystérieux et angélique le lui garde et l’achemine vers lui au moment fixé par la volonté divine. N’a-t-il pas dit de Violette : « Elle était une parole de Dieu qu’il m’avait murmurée dans l’ombre ? » Elle lui était destinée comme il lui est prédestiné. Rien, aucun obstacle et même aucun engagement ne sauraient les empêcher de se rejoindre, et lorsque enfin ils sont l’un à l’autre, ils s’aiment en Dieu et ils se réjouissent qu’en eux et que par eux sa volonté soit accomplie.

Tous les héros de Fogazzaro ne sont point ainsi. Il est trop grand artiste pour n’avoir pas su comprendre et représenter les formes les plus diverses de la vie, même celles qui répondent le moins à son idéal. Une seule chose n’a jamais trouvé place sous sa plume : ce sont les descriptions ou lascives, ou sensuelles. Il est, en effet, profondément convaincu de la puissance communicative de la littérature, ainsi qu’il le déclare dans Une opinion d’Alexandre Manzoni : aussi ne s’est-il jamais permis une peinture de ce genre, fût-elle nuancée de blâme en manière d’antidote ! Jusqu’à cette limite d’ailleurs il ne craint pas la hardiesse. Que l’on se rappelle la nuit de Pierre Maironi, à Vena di Fonte Alta où, après un consentement arraché à Jeanne Dessalle dans une étreinte passionnée, il guette, avec l’ardeur fébrile d’un homme qui a cessé d’être maître de soi, le moment qu’appellent ses sens ! Mais, dans cette limite aussi, il donne des tendresses amoureuses des descriptions exquises et sans pruderie, — celle-ci, par exemple, dans le Petit Monde d’autrefois, un jour que François est au piano :


Il s’aperçut seulement qu’elle approchait lorsqu’il sentit deux bras