M. Janssen a raconté, avec beaucoup de charme, les péripéties de ces ascensions et de celles qu’il fit encore les années suivantes, dans des lectures académiques et dans une série de notices qui ont paru dans les volumes successifs de l’Annuaire du Bureau des Longitudes ; nous, pouvons nous dispenser d’y insister. Ces expéditions devaient aboutir, comme nous le verrons, à la création d’un observatoire ; mais elles ont fourni, en même temps, l’occasion d’une foule d’observations précieuses, relatives principalement au spectre solaire et à la constitution du soleil.
L’une des questions qui préoccupaient M. Janssen était celle de l’existence de l’oxygène dans l’atmosphère solaire ; question importante entre toutes, en raison du rôle que joue cet élément dans les phénomènes géologiques, chimiques et biologiques. Quelques spectroscopistes, trop pressés, avaient d’abord affirmé que l’oxygène existe dans le soleil ; mais cette assertion avait rencontré des contradicteurs. M. Janssen avait à cœur de la contrôler. Ses expériences et celles de M. Egoroff nous ont appris que l’action de l’oxygène sur la lumière se traduit par l’apparition, dans le spectre, de certains groupes de raies fines (les groupes A, B, α) et de bandes obscures qui ne se montrent que si l’absorption est très forte. Ces bandes n’existant pas dans le spectre solaire dès que l’astre est un peu élevé, il était logique de les attribuer à l’action de l’atmosphère terrestre. Mais les raies fines persistent quand le soleil s’approche du zénith, et la question de leur origine est beaucoup plus difficile à trancher.
On peut d’abord songer à les faire naître artificiellement dans le spectre de la lumière électrique, par l’interposition d’une couche absorbante, équivalente à notre atmosphère ; c’est l’expérience que M. Janssen a tentée en 1889, en observant, à Meudon, le spectre de la lumière électrique installée au sommet de la tour Eiffel. La distance est de 7 700 mètres ; les rayons avaient donc traversé une couche de densité uniforme, à très peu près équivalente à la couche, de densité variable, que traversent des rayons venus du zénith. Or le spectre montra les raies fines de l’oxygène avec leur intensité normale ; c’était la preuve de leur origine tellurique. Pour obtenir aussi les bandes obscures, il aurait fallu une distance beaucoup plus grande.
Une autre preuve de l’origine terrestre des raies. A, B du spectre solaire serait fournie par une diminution graduelle de leur intensité, constatée pendant une ascension aérostatique ou