Page:Revue des Deux Mondes - 1907 - tome 38.djvu/205

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
POÉSIES


LA MAISON DE LIVIE


C’est ici que l’habile et modeste Livie,
Feignant de fuir les toits pompeux du Palatin,
Tranquille devant Rome orageuse au lointain,
Autrefois a passé la moitié de sa vie.

Digne épouse du Maître économe et prudent,
C’est ici que, jouant les Lucrèces antiques,
Elle a vécu, fidèle aux coutumes rustiques,
En filant ses habits, en cousant, en brodant…

L’humble atrium est peint encor de vertes fresques,
Où jadis, d’un pinceau délicat et soudain,
Quelque Hellène a fait naître un irréel jardin
Que sa verve a fleuri de détails pittoresques.

Sans doute bien des fois, aux murs de la villa,
Tandis qu’entre ses mains coulait la laine blanche,
Elle a vu cet oiseau perché sur cette branche ;
Ses yeux se sont posés sur cette rose, là…

Et bien des fois aussi, rêveuse au crépuscule
Devant le beau couchant latin couleur de miel,
Elle a dû contempler, sous l’or du même ciel,
Le même horizon bleu qui tremble et qui recule…