Page:Revue des Deux Mondes - 1907 - tome 38.djvu/300

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

clergé. Sous le régime de la Pragmatique, — si schismatique qu’il parût aux rives du Tibre, — les relations ne furent qu’à de très rares intervalles rompues entre Rome et Paris. Il n’en est pas moins vrai que la constitution de Bourges, qui ne fut jamais acceptée ni même tolérée par Rome, aigrissait les rapports à l’heure où ils auraient pu être bons, et, à l’heure où ils auraient pu n’être que médiocres, les exaspérait. Et, de fait, Rome et la Chrétienté assistaient bien à une entreprise qui, sous couleur de rendre au clergé de France, avec les élections canoniques, la disposition de ses biens et le choix de ses chefs, était assurément un premier essai, quelque peu hypocrite, de constitution civile. Eu admettant même que le Roi Très Chrétien n’eût pas eu, en 1438, une pensée aussi arrêtée, les conséquences de l’Assemblée de Bourges devaient, en tous cas, aboutir à ce résultat.

La naissance et les premières années de la Pragmatique viennent de nous être contées avec conscience et succès par un savant qui n’en est pas à faire ses preuves. M. Noël Valois, que son importante Histoire du Grand Schisme a mis au premier rang des historiens de l’Eglise, était désigné pour écrire un chapitre qui, logiquement, fait suite à ceux qu’il avait si magistralement tracés[1]. M. Valois, il est vrai, s’arrête à l’année 1461 qui marque bien une importante étape dans l’histoire de la Pragmatique. J’ai tout lieu d’espérer qu’il ne s’en tiendra pas là. Mais dès aujourd’hui, un certain nombre de travaux plus modestes que les siens permettent d’étudier, à travers les quatre règnes qui suivent celui de Charles VII, les destinées de la « constitution schismatique de Bourges, » pour parler le langage de Rome ; de « l’acte libérateur, » pour prendre celui des canonistes gallicans.

On ne nous croirait pas si nous disions que la Pragmatique Sanction, renfermée dans l’ordonnance royale rendue à Bourges le 7 juillet 1438, est purement et simplement issue du cerveau de quelques hommes d’Eglise et d’Etat. Il n’y a point en histoire de génération spontanée, et l’acte de Bourges était la conséquence d’une situation déjà ancienne. Je n’ai besoin que de la

  1. Noël Valois, Histoire de la Pragmatique Sanction de Bourges sous Charles VII. — Archives de l’histoire religieuse de la France, Picard, 1906. Il convient de signaler ici l’œuvre de la Société des Archives religieuses qui, depuis cinq ans, a déjà publié d’importans documens intéressant les relations de Rome et de la France et qui, notamment, entreprend la publication tant désirée du monde savant, des Nonciatures de France, dont un volume a déjà paru.