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français croyaient trouver la liberté et qui, au contraire, leur imposait une lourde servitude, en faisant d’eux les esclaves des laïques. »

Le malheur était que, parmi ces laïques, il en était un des plus éminens : le Roi Très Chrétien. Certes, on affectait à Rome, depuis 1438, de dénoncer les seuls prélats français : on tenait cependant pour indubitable que, seul, le consentement accordé par le Roi à la « Pragmatique schismatique, » lui avait, dans le royaume, donné force de loi. C’était une ordonnance de Charles VII qui l’avait, en 1438, mise en vigueur ; c’était Louis XII qui, en 1510, l’avait saisie comme une arme empoisonnée ; et si, pour la première fois, un concile allait être appelé à frapper dans son fruit empoisonné « le mauvais arbre gallican, » c’est qu’à Bologne « le gentil roy François » avait semblé — son concordat obtenu, — se désintéresser dorénavant du sort de cette « détestable Pragmatique. »

L’évêque de Cavaillon ayant terminé sa lecture et un seul évêque ayant fait ses réserves, on passa au vote. Le premier consulté devait être le Pape, premier prélat de la Chrétienté. Léon X se leva avec une impétuosité qui ne lui était pas naturelle ; et à la question traditionnelle : Placet ? (Cela te plaît-il ? ) il lit mieux que la réponse ordinaire : « Non solum placet, sed multum placet ! (Non seulement cela me plaît, mais me plaît beaucoup ! ) » Ce cri de triomphe et de soulagement résumait l’opinion de Rome et en disait long sur les craintes que, pendant trois quarts de siècle, la Pragmatique Sanction avait inspirées au Saint-Siège.

De fait, peu de crises, en cette histoire si mouvementée des rapports de la France avec Rome, paraissent avoir troublé de plus scabreuse manière des relations si souvent tendues.

De 1438 à 1516, la France fut bel et bien considérée par la Curie et une très grande partie de ses fidèles, sinon comme un membre séparé, — le mot de schisme était cependant dans bien des bouches, — du moins comme un membre gangrené de la catholicité.

A dire le vrai, on se tromperait, et gravement, si l’on croyait qu’il y avait là une situation analogue à celle que devait créer en France, trois siècles plus tard, la Constitution civile du