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côté de l’Université un second coup de sonde. Le 2 septembre, Antoine de Bourras, abréviateur des lettres apostoliques, crut pouvoir, devant les maîtres de la Sorbonne, attaquer avec violence l’acte de Bourges, « hérétique et réprouvé. » C’était aller trop vite : on lui coupa la parole.

Le Pape connut par là qu’il fallait non point vitupérer, mais négocier. Il envoya un légat en France chargé de conclure un accord. Malheureusement, ce Pierre dal Monte participait à la mentalité de Rome : il le prit de haut et, dès sa première entrevue avec Charles VII, le 23 décembre 1443, il interpella avec vivacité le Roi. « Comment, s’écria-t-il, avez-vous osé accepter de tels décrets ? » Le mot était fâcheux. Cependant Charles VII consentit à entamer une négociation. Le légat lui présenta un projet de Concordat fort peu avantageux. Pierre était plein de confiance : « on briserait cette misérable Pragmatique. » Mais il se leurrait. Le Roi était d’autant moins porté à la laisser « briser, » qu’Eugène IV soutenait en Italie les ennemis de ses cousins d’Anjou, prétendans au trône de Naples. Suivant toujours la même politique, il se retrancha derrière son clergé, qui derechef fut convoqué à Bourges au mois de septembre 1444. L’assemblée déçut un peu le Roi : si elle se montra défavorable aux requêtes du Pape, ce fut en termes fort modérés, et elle n’apporta au projet du Concordat que des amendemens et non une fin de non recevoir. Le Roi avait espéré une résistance plus forte. Son Conseil alors souleva d’autres exigences, et le légat, sans avoir rien conclu, quitta la France.

C’était donc sérieux : Rome resta atterrée. Sa colère se traduisit en termes singulièrement acrimonieux : ils se résument dans un factum dont l’auteur vivait à Rome. Bernard de Rossergue lançait, en novembre 1444, une assez pesante diatribe contre la « révolte damnable » de Bourges, et l’ « entreprise ténébreuse » du clergé français. Et après avoir attaqué nommément quelques ecclésiastiques, il menaçait, — officieusement, — Charles VII, ses conseillers et officiers de l’excommunication.

Croyant peut-être avoir ainsi semé la terreur, la Curie dépêcha, en août 1445, un second légat, Geoffroy Vassal, qui échoua. Mais Eugène IV étant mort sur ces entrefaites, Nicolas V, plus conciliant, expédia en France un nouveau plénipotentiaire,