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Page:Revue des Deux Mondes - 1907 - tome 38.djvu/444

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Le maire offrit ces salles à la Ligue, le collège de Dunkerque et l’Administration des Douanes prêtèrent des lits ; le mobilier et l’approvisionnement furent complétés par des dons en espèces et en nature. La directrice de l’école publique de Béthune, aidée de quelques institutrices, accepta la surveillance de la maison. Ainsi la dépense moyenne par jour et par enfant ne dépassa pas 1 franc. Les enfans se levaient à sept heures et, une fois habillés, se rendaient au réfectoire pour déjeuner. Puis, munis de pelles, de seaux et de filets, ils se rendaient sur la plage. Vers midi, la caravane rentrait. L’air pur et frais de la mer aiguisait les appétits. Le repas se composait d’un potage, d’un plaide viande qui variait chaque jour, d’un plat de légumes et d’un dessert (gâteau ou fruit), le tout arrosé d’un verre de bière ou de vin coupé d’eau. L’après-midi, tous les enfans retournaient à la plage, où, vers quatre heures, une bonne collation (tartine de confiture et verre de lait) leur était servie. Vers sept heures, bien fatigués, mais l’appétit toujours ouvert, ils revenaient prendre leur dernier repas, puis l’on se couchait, et l’on donnait d’un profond sommeil.

Tout cependant ne va pas aussi facilement qu’on pourrait le croire. Il ne suffit pas d’inscrire des noms sur une feuille de papier et d’expédier les enfans comme autant de colis. Il faut d’abord choisir parmi tous ces pauvres petits ; puis il faut composer à chacun un trousseau, réduit sans doute à l’essentiel, mais que les parens ne peuvent même pas fournir ; puis organiser les départs après entente préalable avec les compagnies de chemins de fer. Une fois les enfans embarqués, ce sont les lettres, les visites, les réclamations, plus ou moins intelligentes, des parens. Bien des difficultés peuvent encore naître. Tout d’abord, chez les petits colons, il y a parfois des caractères peu malléables. En 1902, par exemple, une fillette de treize ans se sauva sans raison de chez ses gardiens quelques jours après son arrivée et s’en fut demander asile à une autre famille. Comme cette famille était très honorable, on l’y laissa. Bientôt elle s’échappait encore, après avoir annoncé qu’elle se ferait écraser par le train. On ne la découvrit pas étendue sur les rails du chemin de fer, mais réfugiée chez un aubergiste de fâcheuse réputation, et il fallut la renvoyer à ses parens. Une autre année, c’est une petite fille de neuf ans qui vole du linge et de l’argent. Ces exemples sont rares. Ce qui n’est pas rare non