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Page:Revue des Deux Mondes - 1907 - tome 38.djvu/571

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nationaux allemands (deutsch national). Dans le pays même qui longtemps se glorifia d’avoir enrôlé l’épée de Tilly au service de l’idée impériale et catholique, une science immigrée, forte de l’appui du Roi, détruisait les convictions et les attachemens qui, durant des siècles, avaient hanté l’âme populaire ; et l’opinion bavaroise, qui faisait la cour à Max en suivant les leçons de Sybel, emportait de ces leçons une vive antipathie contre la vocation traditionnelle de la Bavière, un remords même pour les services qu’à travers les âges le peuple bavarois avait rendus à un idéal désormais qualifié d’antinational.

Des journaux se fondaient à Munich pour soutenir les intérêts de la Prusse : Sybel, Bluntschli, s’y intéressaient activement. L’émotion des vieux patriotes bavarois grandissait. « Tu verras bientôt, disait à son lecteur, en 1860, le rédacteur catholique de l’Almanach de Munich, que la vraie lumière n’est pas la lumière du Nord, et tu adresseras avec moi cette prière à Dieu : Ne nous induisez pas en tentation, mais délivrez-nous de Sybel ! » La prière finit par être exaucée : la disgrâce de Doenniges rendit la situation difficile pour Sybel et pour Bluntschli. Un peu refroidis à l’endroit du souverain, ils préparèrent leur déménagement. Au banquet d’adieux qu’on offrit à Sybel, Bluntschli proclama que tout bon historien doit être en quelque mesure un politique. Sybel, de son côté, s’amusant à doser les divers élémens dont se composait la personnalité de Bluntschli, lui disait plaisamment qu’il y avait en lui quatre septièmes de politique et seulement trois septièmes de professeur ; et Bluntschli justifia le mot, en alléguant, pour motiver son départ de Munich, que le sol de Bavière, propice pour une vie de savant, l’était beaucoup moins pour un homme d’action. En fait, à eux deux, avec le concours de tous les « éclairés » que groupaient les banquets du roi Max, ils avaient, à la cour comme à la ville, jeté le discrédit sur l’idée de la Grande Allemagne, et détruit pour longtemps toute connexion entre la politique bavaroise et la cause catholique.


IV

Dresser les petits États protestans à l’idée d’une politique confessionnelle, et susciter, tout au contraire, dans la catholique Bavière, la disgrâce et la ruine de cette même idée ; insurger, par là même, les États protestans contre l’Autriche, et par là même,