Page:Revue des Deux Mondes - 1907 - tome 38.djvu/600

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

qui a décrit, au commencement du XIVe siècle, le mont Lassois en homme qui le connaissait bien, n’a pas oublié de mentionner les ruines de ce puits :


En l’aut de la monteigne avoit un noble puis :
Nus autres plus beaus veus ne fut avant ne puis.
Et saichiés de cel puis issent sept granz fontaines,
Qui sont au piet du mont, beles, clercs et saines[1].


Il connaît aussi sur le mont Lassois une église dédiée à saint Marcel :


On y puet bien veoir l’espee saint Marcel
Et des belles reliques en haut en habitacle
Ou lay en arriers ont esté fait bel miracle[2].


Une bulle d’Eugène III, du 18 novembre 1145, parle de l’ecclesia montis Lasconis[3].

Le mont Lassois était donc au XIIe siècle, et bien plus tard encore[4], couvert de constructions fréquentées et de ruines plus ou moins anciennes, mais assez imposantes pour que l’imagination y ait pu voir les ruines du château de Girard[4].

Ainsi « l’auteur de la Vita place le château de Roussillon dans le voisinage immédiat de l’abbaye en l’honneur de laquelle il écrivait[5]. » L’ancienne chanson faisait-elle de même ? C’est « assez probable, » écrit M. P. Meyer. Montrons que c’est certain.

Au § 59 de la chanson renouvelée, comme le roi a dressé son camp sous Roussillon, dans les prés, un personnage épisodique, Fouchier, qui est magicien, va de Roussillon à sa tente pendant la nuit et y fait un tel enchantement qu’il la détruit. « Puis, il vint sous le Mont Lascon dans la plaine. Là paissent cent mulets et cent chevaux. Il les emmène tous, les fait charger de butin, passe sous Roussillon au chant du coq » et s’en va. Roussillon est donc sur le mont Lascon, pour le poète comme pour le moine. Que veut-on de plus assuré, et pourquoi M. P. Meyer, après avoir interprété Mont Lascon par Mont Laçois dans sa traduction,

  1. Ed. Mignard, p. 17. Montrait-on au XIIe siècle ce puits comme étant celui où Gui de Risnel avait jeté le fils égorgé de Girard ?
  2. Ed. Mignard, p. 26.
  3. D’Arbois de Jubainville, Note sur le pays de Laçois, dans la Bibliothèque de l’Église des Chartes, 1858, p. 348, ss.
  4. a et b Duchesne écrit en 1619 : « Les ruines du chasteau de Roussillon se voyent encore entre Mussi-l’Evesque et Chastillon-sur-Seine. » (Histoire des roys, ducs et comtes de Bourgogne, t. I, p. 232.)
  5. P. Meyer, Girart de Roussillon, p. XXX.