Page:Revue des Deux Mondes - 1907 - tome 38.djvu/607

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

la Gallia christiana[1], tous les historiens ecclésiastiques ont reconnu ce fait certain : il suffit en effet de parcourir[2] la longue série des documens relatifs à l’abbaye de Vézelay depuis sa fondation par Girard et Berte jusqu’à une lettre de Sylvestre II, datée de l’an 1001, pour constater que l’abbaye est toujours placée sous l’invocation du Sauveur, de Marie sa mère, et des saints Pierre et Paul ; de sainte Marie-Madeleine, nulles nouvelles. Elle n’apparaît qu’au temps de l’abbé Geoffroi, lequel gouverna le monastère à partir de l’an 1037, et qui entreprit de la relever de la décadence où elle était tombée. Alors pour la première fois le nom de Marie-Madeleine est introduit dans la titulature de l’abbaye, et c’est dans cette lettre adressée par le pape Léon IX à l’abbé Geoffroi :


Leo, episcopus, S. S. S. Bel, Gaufrido, abbati Vizeliacensis coenobii, quod est in honore Domini nostri Jesu Christi et veneratione eiusdem genetricis et BB. apostolorum Petri et Pauli et B. Mariæ Magdalenae eiusdemque successoribus in perpetuum[3]...

C’est comme l’acte de naissance de la Madeleine bourguignonne : il est daté du 27 avril 1050.

Les débuts de son culte n’allèrent pas sans difficultés, par suite d’un conflit qui opposa pendant près d’un siècle les évêques d’Autun et les abbés de Vézelay[4]. Dans les dernières années du XIe siècle, l’évèque d’Autun Norgaud frappa d’interdit le pèlerinage de la Madeleine, et il fallut, pour lever cette défense, une bulle du pape Pascal II, qui, vers l’an 1104, recommanda à l’archevêque de Sens, aux évêques de Nevers, d’Autun, de Langres et d’Auxerre de protéger Vézelay contre toutes vexations[5]. Désormais, autorisé par le Saint-Siège, le culte de la Madeleine de Vézelay est consacré, et son sanctuaire devient un des plus illustres de la France. Dès 1110, le légat du pape Richard y assigne rendez-vous. Faut-il rappeler que c’est là,

  1. T. IV, p. 467.
  2. Au tome II du Spicilège de d’Achery, livre I de la Chronique de Vézelay.
  3. D’Achery, Spicilège, t. II, p. 505 ; Jaffé, 4213.
  4. Les abbés soutenaient que l’abbaye était un alleu de saint Pierre et se réclamaient de la « liberté romaine » : ingenua libertas, ingenita ecclesiae nostrae libertas, ces mots reviennent sans cesse sous la plume de l’auteur de la Chronique de Vézelay, Huon de Poitiers (lequel ne raconte d’ailleurs que les phases récentes de la lutte).
  5. Nous ne connaissons cet interdit que par la bulle de Pascal II, (qui le lève (Spicilège, t. III, p. 469).