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aujourd’hui des marchés rémunérateurs. Aussi, la culture devenant profitable, la population augmente. Faute de recensemens méthodiques, on ne peut risquer que des approximations, mais celles que nous avons recueillies dans un certain nombre de villes reposent sur des données sérieuses. Sans parler de Smyrne, qui a passé de 200 000 à .320 000 âmes, — avec un commerce de près de 300 millions, — voici Alachehr, « la petite Athènes, » qui, malgré tous ses malheurs, compte 25 000 habitans au lieu de 15 000 ; Afioun-Karahissar, 35 000 au lieu de 20 000 ; Konia, 55 000 ou 60 000[1] au lieu de 45 000.

Cet afflux de population apporte à l’industrie extractive les bras qui lui manquaient. On cite un grand nombre de permis d’exploitation de mines aux environs de Konia : manganèse, chrome, zinc, cuivre et plomb argentifères, mercure. Et les demandes d’autorisation ne manqueront pas de se multiplier le jour où les puissances auront obtenu la re vision de la loi minière, une des moins libérales de la législation ottomane. Le sol de l’Asie Mineure renferme des richesses inappréciables, destinées, tôt ou tard, à circuler sur ses chemins de fer.

Mais il faut bien dire que le tracé de la future ligne de Bagdad n’est pas, à beaucoup près, celui qui assurera la mise en valeur des contrées les plus favorisées. En passant au Nord, par Amasia-Sivas-Diarbékir, ou par Angora-Sivas-Diarbékir, on traverserait une région qui, avec le bassin houiller d’Héraclée, avec ses ressources en fer, nickel et cuivre, constituerait un district industriel de premier ordre. Viennent ensuite les vilayets de Si vas, de Mamouret-ul-Aziz, de Diarbékir, privilégiés à tous égards, arrosés par des eaux abondantes, jouissant d’un climat tempéré dû à la grande différence d’altitude avec les monts voisins de l’Euphrate. Un embranchement le long de la chaussée de Sivas à Samsoun servirait de relais sur la mer. C’est la route que prennent déjà les fruits de Tokat et d’Amasia, poires, pêches, prunes et abricots, réputés à Constantinople. Voici Eghine la verte et Malatia la fleurie, qui cultivent le mûrier, la vigne, le riz, le tabac, la garance. La vallée de l’Euphrate Oriental leur envoie ses cuirs, ses fourrures et ses soieries. Les populations, agricoles ou industrielles, ont été très riches ; elles forment encore un peuple de commerçans.

  1. Évaluation du R. P. Gaudens, Supérieur des Pères Assomptionnistes de Konia.