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le vendredi, sans que le bandage qui le recouvrait eût été dérangé ou touché[1] ; mais ni le Père Debreyne ni l’évêque Eustachi n’avaient vu se former les plaies, ce qui eût été l’essentiel, et ni l’un ni l’autre ne les avaient protégées contre toute espèce de frottement. C’est pour éviter ce dernier reproche que le docteur Warlomont enferma la main gauche de Louise Latenu dans un globe de cristal assujetti au poignet par cinq cachets de cire, après s’être assuré que les ongles coupés très ras étaient parfaitement inoffensifs ; comme le stigmate saignait chaque vendredi, il posa son appareil le jeudi 21 janvier 1874 à deux heures de l’après-midi et il constata que les plaies cicatrisées de la paume et du dos de la main ne laissaient échapper, ce jour-là, aucun liquide sanguinolent ; le lendemain il les trouva saignantes et il recueillit le sang liquide qui était tombé dans le globe de cristal[2] .

Avec Madeleine X… le docteur Janet a été plus heureux encore puisque, sur une peau, déjà amincie il est vrai par des stigmatisations antérieures, il a vu les stigmates se former. Sous l’appareil de cuivre, de caoutchouc et de verre qui avait été scellé sur la face dorsale du pied droit, l’épiderme s’est soulevé, sans aucune action extérieure apparente ; des bulles se sont formées qui ont crevé peu après et donné issue pendant quelques jours à une sérosité sanguinolente[3].

Après des expériences de ce genre, on ne peut guère soutenir que les stigmates du Christ ont toujours été dus à l’artifice inconscient des stigmatisés ; on doit même aller plus loin et reconnaître que si deux épreuves bien conduites, comme celles de MM. Warlomont et Janet, n’ont réussi à établir, pour deux exemples pris au hasard, que la sincérité des stigmatisés et l’origine spontanée des stigmates, c’est dans ce sens qu’on doit conclure équitablement pour la majorité des cas ; et ce sera notre première conclusion.

  1. Essai sur la Théologie morale dans ses rapports avec la Physiologie et la Médecine.
  2. Louise Lateau, par Warlomont, p. 42-45.
  3. Pierre Janet, Une extatique, Bulletin de l’Institut psychologique de juillet 1901.